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cette première signature, le premier « n, » par suite d’une surcharge, a trois jambages, au lieu de deux, et, le second jambage du second « n, » visiblement tracé à deux reprises, descend trop bas. Les trois premières lettres, au contraire, sont remarquablement fermes, sans liaison entre elles, mais bien formées. On les croirait tracées par un débutant qui s’applique et réussit certains jambages mieux que d’autres. Tout y indique une main libre et non tenue. Il ne paraît donc pas douteux que Jehanne ne savait pas signer, ou du moins hésitait à le faire en juillet et août 1429, ce qui explique que les deux premières missives ne soient pas signées. Trois mois après, elle avait appris à signer ou s’y était perfectionnée, et désormais nous ne trouverons plus aucune lettre sans sa signature.

4° Lettre de Jehanne : « A mes très chiers et bons amis gens d’église, bourgois et aultres habitans de la ville de Raimz (Reims) » écrite de Sulli, le 16 mars 1430[1].

Cette lettre porte la signature de la Pucelle. On peut y constater les progrès accomplis depuis quatre mois. Jehanne n’a plus d’hésitation pour tracer son nom ; les caractères sont liés ensemble ; c’est maintenant une signature facile et courante.

L’hiver s’était passé en vaines négociations. L’expiration des trêves avait été reportée de Noël jusqu’au 15 mars, puis jusqu’au 15 avril. Le Duc de Bourgogne réunissait cependant des troupes nombreuses ; aussi les habitans de Reims écrivaient-ils à la Pucelle pour lui dire toutes leurs inquiétudes. Combien, dans sa réponse, Jehanne se peint elle-même en leur disant : « Je serai bientôt près de vous… et leur ferai chausser leurs éperons en telle hâte qu’ils ne sauront par où les prendre !… » Elle ajoutait : « Je vous manderais encore quelques nouvelles dont vous seriez bien joyeux ; mais je

  1. Archives du marquis de Maleissye.