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mesquin. Il est vrai qu’elle ajoute : « Mais son activité, son esprit ne l’est certes pas. »

Le 8 avril, accusée de s’entendre avec les Anglais contre la France, elle cherche à nier les intrigues qu’elle mène en secret d’accord avec Acton et Elliot. Comment quelques pauvres frégates et quelques milliers d’hommes pourraient-ils menacer une puissance aussi forte que la France ? Elle demande la cessation de l’occupation du royaume par quinze mille Français qui le ruinent et qui voudraient faire de Ferdinand « le préfet de Naples. » Elle écarte dédaigneusement les accusations dirigées contre elle. « Je n’ai que trop de raisons de me plaindre et de ne point aimer le Premier Consul. Je le fais vif, sincèrement de voix et par écrit, quand cela vient sous ma plume, et que de fois j’ai été vexée, tourmentée par lui ! Je ne plie point, avec une fausse humilité, devant l’idole du moment, mais avec la même franchise que j’avoue ici, je suis incapable de tramer, de servir des infamies, et j’aime mieux être victime en m’estimant moi-même que de triompher avec mes remords et mon propre mépris. » Elle jure qu’elle n’a point poussé à une nouvelle coalition, ayant trop souffert de la dernière. Elle et son époux veulent rester neutres, mais ils ne seront jamais ni tributaires, ni préfet. Ils renonceront à tout plutôt qu’à une existence honteuse. Et pendant ce temps, son ministre Acton déclarait à Elliot que, malgré les dangers auxquels il était exposé, le royaume de Naples pouvait encore sauvegarder l’intégrité de ses possessions par un concert avec le gouvernement anglais. Il se félicitait de résister aux menaces d’Alquier et aux perfides conseils de Gallo. Sur ces entrefaites, la Reine apprend l’exécution du duc d’Enghien et, dans le silence ou l’approbation d’une grande partie de l’Europe, elle élève la voix. Cela lui fait grand honneur et on doit en féliciter sa mémoire. « L’affaire d’Enghien, écrit-elle le 8 avril 1804, est une forte tache à la couronne de gloire du Premier Consul. Il a violé la loi jurée par lui. Ne l’ayant pas pris les armes à la main, il a violé le droit des gens et, une fois cela fait, l’appétit vient en mangeant et il le fera plus souvent. La haine qu’il a pour moi est injuste. Car une fois que mon mari ne sera plus roi, je lui promets de ne l’aimer ni haïr, ni même plus lire les gazettes pour ne rien savoir de l’abominable et infâme politique. » Elle a appris, à Vienne, l’attentat d’Ettenheim. « Actuellement qui peut se dire