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doute en ce pays, il y fera des études plus détaillées et plus attentives, mais, dès cette première vue, son imagination a été subjuguée par les aspects sombres et terribles de cette campagne volcanique, qui, toute brûlée encore par les flammes intérieures, semble à peine remise de ses dernières convulsions. Sa prose nous offre un programme descriptif pour des tableaux à faire qui ne seront pas tous exécutés. Voici la Vallée des Bains au Mont-Dore : « En s’y enfonçant on commence à voir se détacher, blancs sur un fond d’un bleu vigoureux et indécis, des troncs, d’une forme bizarre et irrégulière, entièrement dépourvus d’écorces ; la hache les a mutilés : quelques-uns semblent des squelettes blanchis d’arbres desséchés par la neige et le temps ; puis, derrière, sont plus serrés ceux qui forment l’entrée de la Vallée d’Enfer, gorge superbe, où Michallon a puisé toutes les études du Roland ; quelques-uns ont été brisés par la foudre, d’autres sont renversés pêle-mêle sous le poids d’un rocher, ou ne tiennent plus à des terrains suspendus qui consolident la montagne et retiennent des éboulemens… la nature sauvage est là dans tout son désordre et son âpreté… » Voilà bien tout ce qu’il s’est efforcé de mettre dans son tableau Le Val d’Enfer au pied du pic de Sancy (Salon de 1848 ; musée de Reims), dont l’aspect, en effet, est si sévère et si angoissant et qu’il est si curieux de comparer avec la transposition opérée par Michallon pour en faire un Val de Roncevaux et le décor lugubrement épique où retentit, une dernière fois, l’appel désespéré du héros carolingien.

Au Salon de 1831, profitant des libertés nouvelles, Huet présente sept tableaux et trois aquarelles. Il y arbore hardiment la cocarde romantique et poétique. Sous le Soleil couchant derrière une vieille abbaye, des vers de Victor Hugo extraits des Rêves (Odes et Ballades) ; sous l’Orage à la fin du jour, d’autres vers du même. Ce dernier, peint en 1827, n’avait fait que changer de titre. C’était notre Cavalier, admiré et connu des amis, mais non encore montré en public :


Voyageur attardé qui t’éloignes si vite,
De ton chien inquiet le soir accompagné,
Après le jour brûlant, quand le repos t’invite,
Où mènes-tu si tard ton cheval résigné ?


Pourquoi ce changement d’étiquette ? Est-ce déjà une