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une plaie pour elle-même et pour les autres aussitôt après la révolution qui lui a donné pour la première fois une assurance réelle de suprématie. Le parallèle est frappant… Les théories whigs en Angleterre n’auraient pas été jusque-là en Amérique, si le trône avait été de ce côté-ci de l’Océan.


M. Wilson, au temps où il était étudiant et fellow à l’université de Johns Hopkins, organisa une société de conférences pour former les étudians en histoire et l’organisa sur le modèle d’un corps législatif. Sans s’arrêter à la forme du Congrès américain, il adopta comme modèle la Chambre des Communes, comme « représentant le plus parfait exemple actuel d’un corps législatif. »

Les deux hommes qu’il cite le plus souvent quand il parle des questions constitutionnelles et politiques sont deux Anglais : l’un est le célèbre Edmund Burke, l’autre Walter Bagehot, critique très érudit de la Constitution britannique, mort en 1877. Leurs noms et leurs opinions se retrouvent fréquemment dans les ouvrages de M. Wilson ; ce sont, semble-t-il, ses auteurs préférés. Bagehot, dit-il, « était d’une grande originalité et paraissait avoir toujours conservé la fraîcheur de la jeunesse ; » quant à Burke, « maintenant que son langage est débarrassé du brogue, il fait résonner par sa voix, tout en restant très irlandais, les meilleurs instincts politiques de la race anglaise. »

La majeure partie du public américain regarde volontiers ses journaux comme les meilleurs du monde. M. Wilson, avec raison, ne se range pas à cette opinion. Il montre, cette fois encore, un esprit tout britannique et donne la supériorité aux grands quotidiens de Londres. Dans une suite de conférences prononcées par lui devant l’université de Columbia, il déclara sans ambages : « Un des plus grands désavantages dont l’opinion publique ait à souffrir aux États-Unis peut se résumer dans ce fait que nous n’avons aucun journal national, aucun organe exposant les idées nationales. » En parlant ainsi, M. Wilson songeait sans aucun doute au Times, dont il a toujours été un lecteur assidu. Dans un passage du Congressional Government, on lit : « Comment se fait-il que tant de personnes intelligentes et pleines de patriotisme, depuis la Virginie jusqu’en Californie, certainement plus attachées à leur État et à l’Union qu’au pays-sœur au delà des mers, s’abonnent aux journaux anglais afin d’y dévorer les débats parlementaires ? » En constatant le fait, M. Wilson l’explique et l’approuve.