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également vider les tiroirs des hommes de la Terreur, et on passa de mains en mains, avec le désordre et le manque absolu de contrôle de l’époque, les papiers provenant de ces perquisitions[1]...

A qui vais-je laisser ce précieux recueil ? Je ne vois personne autour de moi capable de s’y intéresser, ou même de continuer soigneusement la garde de ce dépôt, aujourd’hui centenaire chez nous.

COMTE BEUGNOT.

28 avril 1890.


J’ai décidé de le léguer à la bibliothèque de l’Institut en souvenir de mon père qui fut membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, de 1832 à 1866.

COMTE BEUGNOT

18 mai 1900.


I

« Le public est le tribunal auguste qui peut seul venger la vertu d’une infinité de calomnies que les lois ne punissent pas. Son opinion forme des décrets respectés[2]. »

C’est à ce tribunal, réclamé par Mme de Genlis, et où elle-même a cité la Duchesse d’Orléans, que nous en appellerons aujourd’hui, car le public n’entendit alors que la voix de celle de qui la douce Duchesse disait : « Cette femme à laquelle je n’ai jamais fait de mal et dont je ne parle qu’avec des sanglots. » De fait, lorsque Louise-Marie-Adélaïde réclamait éperdument ses enfans livrés à la dominatrice gouvernante, ses larmes seules la défendirent devant l’opinion. Aujourd’hui Madame d’Orléans répond. Ses lettres admirables et navrantes, monument de tendresse maternelle, diront les souffrances et les humiliations de l’épouse, le martyre de la mère dépossédée de ses enfans qu’elle aimait « si tant ! » Elles éclaireront aussi d’un jour, sinon inattendu, du moins précis, la période, sans doute, la plus cruelle d’une vie qui n’offre qu’une trame ininterrompue de douleurs.

Déjà, la publication récente d’une correspondance[3] entre Louis-Philippe d’Orléans et Mme de Genlis a levé tous les doutes sur une question demeurée jusque-là incertaine. L’affirmation

  1. Des lettres ayant la même origine que celles qu’a recueillies Fiévée furent publiées en 1800 sous le titre de Correspondance de L. P. J. d’Orléans.
  2. Leçons d’une gouvernante.
  3. Maugras, L’Idylle d’un gouverneur.