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deviner la note suivante destinée à être mise sous les yeux de la Duchesse :


Paris, ce jour de Pâques 1791.

« Je suis fort étonné que Mme d’Orléans veuille notre séparation et je suis très éloigné de la désirer ; s’il falloit absolument en venir là, je pense comme M. de Penthièvre qu’une séparation à l’amiable est celle que l’on doit préférer. Mais, pour que je puisse entendre à quelque proposition de cette espèce, il faut avant tout qu’elle me vienne de Mme d’Orléans elle-même, que je sache d’elle ce qu’elle désire, quels sont ses moyens et ses raisons. Je suis très certain qu’elle n’en peut avoir de solides, mais pour suivre la marche de toute séparation à l’amiable, il faut que Mme d’Orléans commence par m’envoyer le détail que je désire.

« L. P. J. D. »


Philippe essaie d’abord de biaiser ; il allègue, pour fléchir la résolution de sa femme, qu’elle excite ainsi les inquiétudes de ses créanciers et peut les porter à des démarches qui compromettraient gravement ce qu’elle entend défendre : c’est-à-dire l’avenir de ses enfans.

La Duchesse ne se laisse pas prendre à cette spécieuse argumentation à laquelle, nettement, elle réplique :


« Ce ne sont point les inquiétudes que j’ai pu marquer sur l’état de vos affaires qui ont excité celles de vos créanciers, c’est votre bilan et d’autres circonstances qui ont déterminé leur opinion, vous prenés occasion des remboursemens qui vous sont demandés pour revenir sur le dernier sort auquel vous m’avés réduite, et pour me prescrire des lois auxquelles vous scavés bien que je ne dois pas souscrire, et je ne permettrai aucune réflexion là-dessus. Je me bornerai à vous demander que votre dernier arrangement subsiste jusqu’à ce que la séparation que je vous ai demandée, et à laquelle vous avés consenti, ait été effectuée, ce qui ne tardera pas, si vous y donnés les mains ainsi que vous l’avés promis.

« J’ai lieu d’espérer que jusque-là vous voudrez bien laisser subsister les choses entre nous, telles qu’en dernier lieu vous les avez établies.

« L. M. A. DE BOURBON. »