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non moins vénérable, celui-là « consulteur du Saint Office » dans la même cité de Florence. Voici d’ailleurs ces deux pièces, traduites le plus exactement possible :


Par commission de monseigneur l’illustrissime Vicaire Général de l’évêché de Florence, — écrit le chanoine Filippo Pieruzzi, — j’ai lu le petit livre intitulé : La Vie de Cola di Rienzo racontée par Gabriel d’Annunzio, etc. Je n’y ai rien trouvé qui fût contraire à notre sainte Foi, non plus qu’aux bonnes mœurs : mais bien j’y ai trouvé, répandue à travers tout le livre, et unie à la profondeur de l’érudition, une merveilleuse justesse et beauté d’expression, avec une ordonnance des mots qui, sans cesser d’être de la prose, ne manque ni de l’éclat, ni de la douceur du vers. De telle sorte qu’il me parait possible de dire en pleine vérité que l’auteur a réuni, dans cette composition, toutes les grâces des Muses.


Vient ensuite le visa du Vicaire Général de Florence, autorisant l’impression du rapport ci-dessus. Et voici maintenant la troisième et dernière « approbation, » rédigée, sur l’ordre du « révérendissime Père Inquisiteur, » par le « noble seigneur Telesforo Cerusichi, consulteur du Très Saint Office » :


Très révérend Père Inquisiteur, — En obéissance à l’ordre qui m’a été donné par Votre révérendissime Paternité, j’ai lu avec l’attention qui m’était prescrite le petit livre intitulé : La Vie de Cola di Rienzo racontée par Gabriel d’Annunzio, etc. Je n’y ai trouvé absolument rien qui répugnât à notre sainte Foi, non plus qu’aux bonnes mœurs. Mais, à ma très haute consolation, j’ai admiré l’éloquence, l’érudition, et l’abondance des images, et la richesse de ces agrémens de la langue que possède au suprême degré l’illustre écrivain. Celui-ci, déjà applaudi de toute la république des lettres dans le monde entier pour d’autres de ses œuvres, a, cette fois, uni à la douceur de sa parfaite langue toscane l’utilité de très nobles leçons : en telle sorte que j’estime son présent livre éminemment digne de la lumière publique de l’impression, pour l’instruction et le plaisir communs des lecteurs.


La pensée de solliciter ces deux dernières « approbations » aura, sans doute, été suggérée à M. d’Annunzio par le souvenir de la récente mise à l’Index de la plupart de ses écrits antérieurs. Mais il n’en reste pas moins que la présence de tels imprimatur religieux à la fin d’un livre aussi manifestement « temporel » et « profane » que celui-là, tout de même que leur accouplement avec l’ « approbation, » toute littéraire, de l’Académie de la Crusca, nous apparaissent des traits nouveaux de cette originale fantaisie personnelle qui, depuis vingt ans, a peut-être contribué, plus encore que la maîtrise poétique de l’auteur du Triomphe de la Mort, à lui valoir, auprès de ses compatriotes, une