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n’est-il pas en droit lui aussi de prendre quelques licences et d’oublier parfois la couleur locale par esprit de race ?

Ceux qui suivent et apprécient ici même les études critiques de M. de Wyzewa sur les littératures des pays étrangers et les caractères des œuvres les plus diverses, qui prisent la souplesse de son talent et l’universalité de ses connaissances, auront une fois de plus la preuve de sa facilité à parcourir tous les sujets, son aptitude à traduire toutes les langues et à adapter leurs chefs-d’œuvre à la nôtre, en lisant les trois nouveaux volumes qu’il apporte à la collection les Grandes Œuvres[1]. Après Homère, Rabelais et Dante, ce sont les pages les plus célèbres des Bucoliques et des Géorgiques de Virgile[2], suivies d’un choix d’Idylles de Théocrite, du Faust[3] de Gœthe et des Contes de Shakspeare interprétés par Charles Lamb[4], traduites de ces trois auteurs. Ce n’est pas seulement à l’enfance qu’elles s’adressent. Elles rappelleront, à tous les cœurs sincèrement épris de pure, profonde et vivante beauté, quelques-uns des momens les plus délicieux de leur jeunesse, quand le charme sans pareil de ces vers immortels du poète des Églogues et de l’Enéide les transportait, loin des sombres murs rébarbatifs du collège, au milieu des idylles amoureuses de la vie champêtre, ou vers l’épopée des âges héroïques. Dans les 24 planches hors texte en couleurs qui ornent les pastorales de Virgile et les idylles de Théocrite, M. F.-M. Roganeau, familiarisé par son séjour à la villa Médicis et dans la Péninsule avec les paysages d’Italie, a su évoquer dans leur milieu les charmes de la vie champêtre. On retrouve dans l’illustration des Contes de Shakspeare par M. Henry Morin son talent habituel de composition, comme aussi la manière dramatique et saisissante, de M. René Pougheon dans le Faust de Gœthe.

Une réunion d’auteurs de talent s’est dévouée à l’instruction de la jeunesse et elle cherche à atteindre ce but en l’amusant. Citons parmi ceux qui sont entrés dans cette voie et dont nous n’avons pas assez de place pour analyser les volumes, qui, d’ailleurs, y perdraient beaucoup de leur imprévu et de leur attrait ; chez Delagrave : Cœurs d’Alsace et de Lorraine[5], par M. E. Hinzehn, qui fait revivre les mœurs, la poésie et les traditions des deux chères provinces qui ont gardé intact leur amour pour la France ; — Jean le loup[6], de Jean Nesmy, l’auteur du Roman de la Forêt. Dans ces nouveaux contes qui rappellent le Roman de Renard, il met en scène, avec le talent que l’on sait, des animaux et leur fait accomplir mille tours ; — l’Eau Tournoyante[7] de

  1. Henri Laurens.
  2. Henri Laurens.
  3. Henri Laurens.
  4. Henri Laurens.
  5. Delagrave.
  6. Delagrave.
  7. Delagrave.