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rives de la Tamise, comme dans la capitale de l’Eryri, l’art est mis au service de la politique. La reconstitution d’une cérémonie médiévale est conçue de manière à satisfaire les hommes de goût et à ménager les hommes de parti. La fête, qui pourrait n’être qu’une cavalcade de bon aloi, un spectacle gratuit pour la foule, prend la valeur d’un spectacle de beauté et d’une messe du patriotisme.

Dans la cour intérieure du château de Carnarvon, revêtue des mêmes tapisseries à fond bleu qui donnèrent à Westminster une parure digne de ses ogives, défilèrent successivement deux cortèges. Si le Roi et la Reine parurent escortés des shériffs et des lieutenans des comtés gallois, des lords de la terre galloise, figurans ordinaires des pompes monarchiques, le Prince de Galles est accompagné par les maires de ses bourgs, dont trois au moins, le lord maire de Cardiff et ses collègues de Swansea et de Newport sont les élus de la classe ouvrière, et par les députés de sa province, dont l’un, J. Keir Hardie, est un apôtre du socialisme collectiviste. A côté de lui se trouvent plusieurs de ses collègues du Labour party. L’occasion a été saisie pour élargir le cadre des officians habituels et entretenir le loyalisme des « nouvelles couches. »

Par mille détails, on a voulu flatter le patriotisme gallois et conquérir cette force impériale. Les chanteuses portent le chapeau haut de forme et la mante écarlate, le costume national. Des druides aux robes blanches et bleues figurent parmi les délégations chargées de saluer les souverains. Dans le clergé, qui doit appeler les bénédictions célestes sur la tête du prince de Galles, se trouvent, à côté des prélats anglicans et d’un évêque catholique, le Président de l’Union congrégationaliste galloise, le modérateur des calvinistes méthodistes, le Président de l’Assemblée méthodiste wesleyenne. L’hymne sera chanté, la bénédiction sera donnée en anglais et en gallois. Une place importante est faite au dialecte celtique dans les adresses des municipalités et dans les discours du Prince. Tout l’or nécessaire pour la couronne et la verge, pour l’anneau, l’épée et la boucle a été fourni par les mines de Carnarvon. Dans l’ornementation de ces objets -rituels, le narcisse et le dragon gallois jouent un rôle prépondérant. Sur l’épée seront inscrits, en gallois, le nom et la devise du Prince. Ses armoiries ont été modifiées. L’écusson de Saxe a disparu : il a été remplacé par