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celui de LIewellyn, le dernier prince de race celtique et le champion des libertés galloises.

Ses descendans, boutiquiers méthodistes, ouvriers socialisans, flattés dans leur orgueil et touchés dans leur patriotisme, constitueront, désormais, pour la couronne anglaise, des sujets plus loyaux encore que par le passé.


Je sais bien que M. D. Lloyd George s’est attribué tout le mérite de cette innovation et tout le succès de ces fêtes. Il est en effet possible que le député de la circonscription et le constable du château de Carnavon ait cru trouver, dans cette cérémonie, le moyen de faire oublier à un monarque, conservateur par ses origines et par ses sympathies, qu’il avait ligoté ses pairs et pressuré son aristocratie. En admettant que l’idée appartienne au démagogue gallois, il est certain, — et nul ne le nie, — que dans sa réalisation pratique, dans le caractère et les détails de cette « investiture, » la volonté royale a joué un rôle prépondérant.

En tout cas, les dernières fêtes, qui marquèrent cette année impériale de 1911 sont, au vu et au su de tous, dues à l’initiative de George V. Le Daily Chronicle, l’organe officieux du cabinet Asquith, l’a reconnu nettement : « Ce projet nouveau, sans précédent dans l’histoire anglaise, la pensée que le Roi quitterait l’Angleterre pour trois mois, s’exposerait à des dangers vagues, inconnus, sur une terre d’Orient, inspiraient des appréhensions à quelques-uns de ses conseillers. Les seuls désirs de Sa Majesté furent le facteur décisif. » Or le Durbar de Delhi, par les manifestations qu’il a provoquées et l’accalmie qui l’a suivi, restera une date dans l’histoire politique de l’Inde anglaise.

Il faut avoir présens à l’esprit les péripéties de la crise indienne, le boycottage des marchandises britanniques et les essais de grèves politiques, les émeutes dans la rue et les explosions de bombes, les angoisses du gouvernement impérial, l’énergie de sa répression et l’audace de ses réformes [1], pour comprendre la joyeuse surprise qu’éveillèrent les manifestations du loyalisme indigène.

  1. J’ai analysé sommairement cette crise indienne dans l’Angleterre radicale (1906-1913), Félix Alcan.