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autorité, des missions diocésaines témoignent de son désir de donner à son clergé de fréquentes occasions de se connaître et d’exercer sur les fidèles une plus grande influence. Partout, il paie de sa personne. A tout instant, il monte dans la chaire et, ne trouvant pas suffisant l’énorme labeur qui lui incombe de ce chef, il tient à honneur de conserver la direction des âmes auxquelles il s’est dévoué. Chaque jour, partent de l’évêché des lettres qui leur sont destinées et qui leur apportent ses conseils spirituels. Les déplacemens ne lui font pas peur. Un jour, il apparaît dans les plus humbles paroisses de son diocèse ; le lendemain, il est à Paris où des questions politiques et religieuses le réclament. De sa plume féconde sortent des brochures, des livres, des mandemens, et même des articles que publient le Correspondant et l’Ami de la Religion. « Au fond, dit encore M. Emile Faguet, il n’avait pas échangé sa vie ecclésiastique de Paris contre un diocèse, il avait ajouté l’administration d’un diocèse à sa vie ecclésiastique de Paris. »

En inventoriant les œuvres innombrables auxquelles il suffisait, on reste partagé entre la surprise et l’admiration. Il n’était plus jeune et, dans le passé, il s’était tant prodigué qu’on pouvait s’attendre à le voir en proie à un peu de lassitude et contraint de faire trêve à tant d’immenses travaux. Mais il n’en était rien et, de même que ses yeux trahissaient toujours dans leur rayonnement l’énergie de la jeunesse, de même toute sa conduite, toutes ses paroles aussi bien que tous ses écrits témoignaient de son ardeur indomptable dans l’accomplissement du devoir.

Elle n’était pas moindre quand il s’agissait de renverser des obstacles que lui suscitait parfois l’intransigeance de certains catholiques intolérans dont les doctrines étaient représentées dans la presse française par Louis Veuillot. Déjà, son goût pour l’humanisme avait attiré sur lui de nombreuses critiques, et la querelle qui s’était élevée entre ses adversaires et lui lorsque, vicaire à la Madeleine, il enseignait le catéchisme, se ralluma à propos de certains traits de sa vie épiscopale. Elle prit même un tour plus acerbe lorsqu’on sut qu’à son petit séminaire de la Chapelle-Saint-Mesmin, il faisait jouer en grec les pièces des poètes tragiques de l’antiquité ; mais il ne se laissa pas démon- ter par ces attaques ; à ceux qui lui reprochaient d’enseigner à la fois la religion chrétienne et les auteurs païens et d’administrer