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est celle de l’honneur. Nous sommes tenus de défendre la Belgique… Les membres du Gouvernement anglais déclarent publiquement et explicitement qu’ils entendent respecter nos traités, remplir loyalement leurs engagements, et ne pas déshonorer le nom de l’Angleterre. » C’est à peu près le même langage que l’on vient d’entendre dans la bouche de sir Edvard Grey : « Ce que voulait le chancelier, en somme, a dit le loyal ministre, c’était amener la Grande-Bretagne à rester les bras croisés, tandis que les colonies françaises seraient prises et que la France serait battue, aussi longtemps que l’Allemagne ne s’emparerait pas de territoires français proprement dits. Ce serait une honte pour la Grande-Bretagne que d’agir ainsi, une honte dont elle ne se relèverait jamais. La Grande-Bretagne ne peut non plus accepter le marché proposé par l’Allemagne en ce qui touche la Belgique. »

Le duc de Gramont et Benedetti, assez embarrassés, cherchèrent à opposer les dénégations du Gouvernement impérial à la divulgation surprenante d’un traité qui n’était d’ailleurs qu’un projet très vague ; mais le coup était porté. Toutefois, il convient de remarquer que Napoléon III avait adressé au roi Léopold, avant la déclaration de guerre, une lettre où il promettait de respecter la neutralité belge, espérant qu’il recevrait les mêmes assurances du côté de la Prusse, et le 16 juillet, il confirmait cette lettre au baron de Nothomb. Le Cabinet de Londres crut devoir faire préciser la situation et prendre des garanties par un traité avec la Prusse le 9 août, et par un autre traité avec la France le 11 août 1870. Il dit que si la Confédération de l’Allemagne du Nord ou l’armée française venaient à violer la neutralité belge, la reine des Royaumes-Unis de la Grande-Bretagne et de l’Irlande emploierait toutes ses forces navales et militaires pour assurer et maintenir cette neutralité. D’autre part, la Belgique mit son armée sur le pied de guerre pour garder son territoire et en interdire l’accès aux forces belligérantes.

Le 20 décembre 1870, le roi Léopold II félicita l’empereur Guillaume de son élévation à l’Empire, croyant voir dans cet événement « le rétablissement de l’ordre du droit en Europe. » « Le roi, dit le kronprinz Frédéric-Guillaume en son journal, ajoute qu’il s’efforce de remplir les devoirs que lui impose sa neutralité, mais que les avantages que donne cette situation ne sont pas sans avoir pour contre-partie de lourdes charges et