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que l’allocution officielle du Consistoire faite à tous les cardinaux. Parmi ceux auxquels a été adressée la première, il y avait des cardinaux qui ont obtenu, a-t-on dit, et comme on l’avait annoncé, des voix assez nombreuses au conclave. Parmi ceux qui ont reçu la seconde, ii y avait celui qui est aujourd’hui le successeur de Pie X.

L’allocution du 17 avril 1907, quand elle éclata, inattendue, à Rome, fit un effet énorme dans les milieux religieux. Depuis bientôt quatre années que durait le règne de Pie X, on avait vu poindre les signes précurseurs d’une guerre dont on était loin de soupçonner l’extension qu’elle prendrait. L’avènement du Pape avait trouvé les esprits agités par des discussions passionnées sur des matières graves, où bien des idées troubles et hardies semblaient se faire jour, où la temporisation diplomatique de Léon XIII avait évité de rendre des arrêts. Pie X commença par des condamnations retentissantes et on sentait qu’il ne s’en tiendrait pas là. Il était ému, disait-on, par ce qu’on lui avait rapporté des séminaires d’Italie où les idées nouvelles avaient pénétré. C’est alors que, dans l’allocution à ces cardinaux, tous italiens, sauf l’un d’eux, il se dresse publiquement, pour la première fois, contre le « modernisme. » Il ne lui donne pas encore ce nom, il le dénonce déjà comme « ce qui n’est pas une hérésie, mais le résumé et le suc vénéneux de toutes les hérésies, ce qui tend à saper les bases de la foi et à anéantir le christianisme. »

Ce n’était que l’annonce de tout ce qui allait suivre. Peu de temps après, paraissait le décret Lamentabili, le « Syllabus » du modernisme dont il cataloguait un certain nombre d’erreurs. Le 8 septembre, était publiée l’encyclique Pascendi. C’est un vaste document collectif dans l’histoire de l’Eglise ; on peut y détacher, pour la psychologie personnelle du Pape, le portrait satirique du « modernisme, » où s’excite la verve d’un pontife que, dans son sens simple, choquent et indignent tant de détours et de subtilités. Et il faut mettre à part, en les attribuant à son esprit pratique, les « remèdes » de la fin, tout cet ensemble de dispositions minutieuses qui établissent dans l’Eglise un régime sévère de surveillance et de répression. Ce système, renforcé bientôt par le Motu proprio du 18 novembre, Præstantia, puis par d’autres mesures parmi lesquelles nous ne citerons que celle du « serment antimoderniste, » devait faire naître certaines