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jours de février, et à y former une garde nationale, dont il prit le commandement, avec le grade de colonel. C’est cette troupe qui fit ensuite la comédie d’assiéger Ancône ; on n’y brûla que quelques amorces et l’on n’y répandit pas une goutte de sang. Fait général et commandant de l’avant-garde, il arrivait à Foligno en même temps que nos princes. Depuis, rien n’a marché au gré de ses désirs. Il tempête contre le gouvernement provisoire, qui paralyse à Bologne les efforts faits par le prince Napoléon pour former une garde nationale, laisse ici l’avant-garde dans le dénûment et surtout l’arrête, lui, Sercognani, dans le serment qu’il avait fait d’aller à Rome.

On a peine à croire qu’avec quelques compagnies de garde nationale mobilisée, avec quelques bandes de volontaires sans artillerie, il aurait réussi dans un pareil projet. Au moins aurait-il fallu amener à Terni quelques-uns des obusiers qui sont à Ancône ; c’est là un conseil que le prince Louis avait donné, et pour l’exécution duquel les moyens ont manqué. La Reine écouta par politesse le plan que Fier-à-Bras lui démontra sur la carte et dont il parait vouloir la faire juge. N’étant point femme de guerre, tout ce qu’elle peut faire pour lui c’est de le retenir à dîner, ainsi que son secrétaire ; celui-ci a servi en Algérie avec le général de Bourmont, dont il était l’officier d’ordonnance.

Une stratégie à moi me porte à leur dire que la possession de Civita Castellana aurait été d’une grande importance comme permettant de ravitailler l’armée par la mer et d’avoir ainsi à peu de frais tout ce qu’il faut aujourd’hui apporter d’Ancône au prix de si grandes difficultés. La Reine croit aussi qu’une entreprise sur Civita Castellana aurait été utile, mais pour une autre raison : c’est que les insurgés auraient eu là une porte de sortie pour se réfugier en Corse en cas de malheur.

Toute cette conversation la persuada qu’en dépit du mot « d’avant-garde » appliqué aux forces de Sercognani, nous sommes ici sur les derrières de l’armée constitutionnelle et dans la partie intérieure du dispositif. Des lettres de ses enfans lui arrivent, apportées par une bande de volontaires de Rimini Pleins de courage et d’espérance, ils croient encore que les Autrichiens n’entreront pas, ou bien qu’on les repoussera, blâment leur mère d’avoir quitté Florence et l’engagent à y retourner. Elle se confirme, au contraire, dans son plan et le leur écrit.