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des peuples, en les pacifiant. Et malgré ce glorieux souvenir, il était en 1899, au moment où s’ouvraient les séances de La Haye, frappé d’une irrévocable exclusion. Elle apparaîtra peut-être, dans le recul de l’histoire, comme un fait aussi grave, sinon plus grave, que la perte du pouvoir temporel : la défaite qu’avait, en 1870, subie la Papauté modifiait les conditions de son magistère et amenait les consciences chrétiennes à se demander, anxieuses, s’il pourrait demeurer libre ; la disgrâce qu’elle dut supporter en 1899, — cette disgrâce dont le cardinal Rampolla ne parlait qu’avec angoisse, — était une méconnaissance de son magistère même et des prérogatives qu’avait accordées à sa souveraineté morale une longue série de siècles.

Dans l’immense guerre qui nous exalte et nous meurtrit, notre sang et le sang de nos alliés achèteront, nous en avons la ferme confiance, certaines réparations justicières : le droit de la Pologne à vivre comme peuple, le droit de l’Alsace à rentrer dans la communion française, triompheront par le sacrifice de toutes les vies humaines qui s’offrent et se donnent pour l’abolition de l’injustice. Il serait douloureux que, dans les rendez-vous diplomatiques qui succéderont à la guerre, on perpétuât systématiquement, au détriment de la Papauté, certains ostracismes qui sont, eux aussi, une injustice. L’histoire n’a pas oublié que la présence du cardinal Consalvi fut l’une des gloires du Congrès de Vienne, il y a tout juste cent ans. Ne pas mettre le Saint-Siège en mesure de remplir tout son devoir envers l’humanité, ce serait une faute contre l’humanité : la voix d’un Pape ne doit jamais être considérée comme inopportune, ni comme importune, ni même comme oiseuse, là où l’on parle d’arbitrage, de médiation, de paix.


Il serait possible, d’ailleurs, que, conformément à certains vœux présentés au Concile du Vatican, un travail théologique s’accomplit pour remettre en lumière et proposer à l’attention des hommes ce vieux « droit des gens » chrétien que le moyen âge élabora. De même que Léon XIII sut trouver dans saint Thomas les élémens de son encyclique sur la condition des travailleurs contemporains, de même un de ses successeurs peut