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obusiers de campagne, artillerie lourde ; puis G corps d’armée en trois lignes, deux par deux, couverts par des flancs-gardes ; enfin une réserve de deux corps. Au total, près de 400 000 hommes pour un front d’une vingtaine de kilomètres : 20 hommes par mètre courant.

Avant tout autre progrès matériel, on pourrait déjà réaliser des coordinations plus vastes encore. On entrevoit le synchronisme des opérations alliées par-dessus un pays comme l’Allemagne. Resté un peu vague dans la guerre actuelle, il pourrait devenir tout à fait précis. Il se trouvera sans doute des hommes capables de tirer parti des moyens scientifiques déjà acquis pour obtenir des effets autrement puissans que ceux où s’essayent nos stratèges. On n’est qu’à l’aube des mouvemens de masses. Ces effets ne se mesurent pas seulement au nombre des hommes concourant à la fois à la même combinaison stratégique, mais aussi à l’ampleur d’autres concentrations : celle du matériel d’abord. Notre offensive de mai autour de Notre-Dame-de-Lorette était préparée, dit-on, par 1 100 pièces de canon ; celle de la phalange Mackensen sur la Dunajec par 1 500. Les Allemands en auraient amené 4 000, sur un front de 50 kilomètres, en face des Russes.

A côté du matériel canon, il faut aligner les autres mécanismes de guerre, mitrailleuses, avions, autos, wagons, etc. ; le matériel de protection : masques contre l’asphyxie, cuirasses ou têtières, outils à tranchées, fil de fer barbelé, ciment ; le matériel consommable : munitions, explosifs, vivres. On est surtout limité pour celui-ci, par l’approvisionnement en cartouches, qui se développera certainement dans d’énormes proportions. La consommation d’obus est restée fort inférieure aux besoins de l’artillerie. On avait tablé, en France, sur une dépense moyenne de 13 000 coups par jour. Nos adversaires, plus prévoyans, s’attendaient à 35 000. Or, certains jours de bataille en ont coûté plus de 100 000. L’Allemagne, dit-on, en fabrique 250 000 par jour. Et cependant, nos artilleurs s’astreignent à la plus extrême économie. Un canon de 75 peut tirer 25 coups par minute. En admettant une allure relativement modérée et quelques minutes seulement d’activité à l’heure, on arrive tout de même à 100 ou 200 coups par heure de bataille et par pièce. Il est probable que les usines belligérantes, dans l’avenir, devront fournir et les convois transporter et distribuer sur le front, journellement,