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la maîtrise de la mer, en aviation la maîtrise de l’air. Alors seulement, on peut aborder librement les opérations profitables contre la terre. La plupart du temps, comme la maîtrise de la mer se conquiert au large, la maîtrise de l’air se décidera dans la haute atmosphère, hors de portée de la plupart des canons terrestres. La question se réglera entre aériens. La guerre du large aura pour théâtre une couche limitée par en bas à la zone des obus venus de terre, par en haut à celle où l’aéroplane ne peut monter. L’un au moins des adversaires aura toujours avantage à gagner ce champ, libre des interventions d’en bas ; et son initiative obligera l’autre à l’y suivre, sous peine d’être dominé et bombardé d’en haut.

On manœuvrera donc pour prendre l’avantage de l’altitude, comme les flottes à voiles manœuvraient pour gagner l’avantage du vent. Mais les groupes ennemis se suivront en se disputant le zénith. La couche atmosphérique où se dérouleront leurs combats ne sera peut-être pas fort épaisse : sans cesse, les progrès de l’artillerie terrestre pousseront plus haut ses projectiles efficaces, et l’ascension de l’aéroplane est loin d’être indéfinie.

D’ailleurs, pour combattre, il faut se rapprocher. C’est utile, même pour essayer de laisser tomber des bombes sur l’ennemi volant, si difficile à saisir sous soi, en raison de sa grande vitesse. Et la guerre aérienne aura d’autres armes. Outre ce tir vertical de haut en bas, qui permet l’emploi de grosses bombes, elle aura le tir horizontal ou incliné de ses mitrailleuses, de ses petits canons. Enfin, l’oiseau mécanique pourra agir par choc.

On peut ainsi envisager trois genres d’avions de ligne : les spécialistes de la hauteur, navires légers et rapides, puisque c’est la plus grande vitesse qui soutient dans un air plus raréfié ; les spécialistes du choc, armés d’un éperon ; les avions canonniers, alourdis par leur artillerie. Les deux premières catégories se confondront peut-être, ayant pour qualité commune la rapidité de marche. Il semble que le monoplan soit désigné pour ce rôle.

Trois élémens de la guerre maritime sont ici sans équivalens : la protection lourde, qui nécessite des poids inconciliables avec le vol ; l’invisibilité du sous-marin, autre forme de protection ; enfin la grosse artillerie à longue portée. Dans les airs, on se battra de près, sauf, à l’occasion, dans le sens vertical. Les passes seront rapides, terribles. Les vaincus,