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fallait. Huit jours, continuellement, l’eau sur le corps et les pieds froids m’ont fait un peu de mal, mais la journée d’aujourd’hui m’a reposé. J’ai rempli mon dessein ; j’ai détruit l’armée autrichienne par de fortes marches, j’ai fait 60 000 prisonniers, 120 pièces de canon, plus de 90 drapeaux et plus de 30 généraux. Je vais me porter sur les Russes, ils sont perdus. Je suis content de mon armée ; je n’ai perdu que quinze cents hommes dont les deux tiers faiblement blessés. Adieu, ma Joséphine, mille choses aimables partout. Le prince Charles vient couvrir Vienne ; je pense que Masséna doit être à cette heure à Vicence. Dès l’instant que je serai tranquille pour l’Italie, je ferai battre Eugène. Mille choses aimables à Hortense.


Signé : NAPOLÉON. »

D’Elchingen, 27 vendémiaire (19 octobre).


Près d’un mois se passe sans que Joséphine écrive à son fils ; mais c’est qu’elle a quantité de visites et de cérémonies : le Te Deum pour la prise d’Ulm, la réception de la députation du Tribunat, des bals, des concerts et des cercles à la Cour ; la réception des maires de Paris allant en députation près de l’Empereur ; les audiences (6 au 9 brumaire, 28 au 31 octobre), au prince électoral de Bavière ; audiences du matin, audiences du soir, et spectacle au Théâtre-Français ; puis c’est l’électeur de Bade, avec le prince héréditaire et le prince Louis, et les fêtes qu’on leur donne : diner, cercle, concert, bal, bal qui se prolonge jusqu’à deux heures du matin, et puis le 20 (11 novembre), la représentation à l’opéra allemand où l’on joue le Miroir d’Arcadie du célèbre Kissmayer. Le lendemain, elle écrit :


À Strasbourg, ce 21 brumaire (12 novembre).

« Je vois, mon cher Eugène, par tes derniers bulletins, que l’Armée d’Italie se couvre aussi de gloire et que l’ennemi est en retraite. Tout va aussi bien que nous pouvions le désirer. De mon côté, je ne suis pas moins heureuse en voyant s’approcher le moment où je pourrai aller rejoindre l’Empereur. Je suis bien sûre qu’il me tiendra la promesse qu’il m’a faite et que je partirai le plus tôt qu’il sera possible. On dit que l’Électeur m’attend à Munich et qu’on prépare de belles fêtes pour moi. La