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Comité des armateurs fut unanime à protester contre le danger dont elles menaçaient la Marine marchande. Les notes de séance de la réunion tenue par le Conseil de direction, le 14 janvier 1910, résument brièvement, comme suit, l’appréciation de l’armement : « Les sanctions nouvelles prévues par cet avant-projet sont illusoires dans beaucoup de cas. La procédure de leur application donnerait lieu, en outre, à des discussions continuelles dont le principe même serait la ruine de toute discipline à bord. Enfin, l’autorisation donnée par le chapitre II de rompre le contrat d’engagement sans encourir aucune pénalité, alors qu’il a été régulièrement souscrit, rendrait impossible l’exercice de l’industrie de l’armement, mettrait les armateurs dans l’impossibilité d’assurer la régularité du départ de leurs navires, et éloignerait définitivement de notre pavillon la clientèle des passagers et des chargeurs. » Les ministres intéressés partagèrent d’ailleurs ces inquiétudes. Le ministre du Commerce et de l’Industrie fit observer justement que certaines dispositions de l’avant-projet compromettaient gravement l’autorité du capitaine et constituaient un danger pour la sécurité des personnes embarquées, et un obstacle absolu à la régularité des services. Il prévint qu’ « il donnerait mandat à ses représentans au Conseil supérieur de la Navigation de combattre ces dispositions. » Le ministre de la Marine « reconnut la nécessité de la discipline dans l’industrie des transports maritimes et déclara que les quarante années qu’il avait vécu dans la discipline se portaient garant pour lui qu’il ne mettrait pas sa signature au bas d’un projet de loi portant atteinte à l’autorité du capitaine et menaçant ainsi la sécurité de la navigation. »

Mais alors, qu’attendons-nous ?... Tout simplement le vote du projet de loi transactionnel qui fut déposé par le Gouvernement dans la séance de la Chambre des Députés du 6 mai 1913 et qui, partageant en cela l’infortune de beaucoup d’autres, dort au fond de quelque casier du Palais-Bourbon.

Certes ce projet n’est pas parfait. Tel qu’il est, cependant, il pourrait instaurer un modus vivendi acceptable à condition qu’il fût respecté. « Tout en consacrant le principe d’une législation disciplinaire et pénale maritime distincte de la législation générale, lisons-nous dans l’exposé des motifs, le projet de loi réalise le retour au droit commun en matière de compétence