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ennemis excellent à déguiser la vérité, nous sommes en droit de nous demander si les statistiques qu’ils publient sont exactes. Nous les avons admises toutefois comme base de notre étude, parce que nous pensons qu’il est moins dangereux d’exagérer la force de son adversaire que de la sous-estimer. Ne cherchons pas à nous faire d’illusions sur la prétendue faiblesse des Teutons. C’est une race vigoureuse, animée d’un patriotisme étroit, brutal et farouche, mue par des instincts bas et prête à fouler aux pieds toutes les institutions divines et humaines pour asseoir sa domination sur le reste du monde. Son armature économique, nous ne cessions de le répéter avant la guerre, était puissante ; elle l’a fortifiée au début de la campagne par l’occupation de la Belgique et du Nord de la France, plus tard par celle de la Pologne, de la Serbie et de la Roumanie. Elle a pressuré de la façon la plus éhontée les populations des territoires envahis, prélevé des contributions monstrueuses et augmenté ainsi ses disponibilités financières. Elle paraît avoir récemment accentué ses pillages, en ne respectant plus aucune partie de la propriété privée et en allant jusqu’à fracturer des coffres-forts et à voler des titres. Quant à l’enlèvement systématique des machines, des matières premières, l’exploitation à son profit des mines et des houillères appartenant à des particuliers, c’est depuis les premiers jours de l’invasion que cette vaste entreprise de banditisme se poursuit. L’addition des sommes et des valeurs que l’Etat-major berlinois s’est ainsi adjugées forme un nombre respectable ou plutôt très peu respectable de milliards, qui ont allégé d’autant les budget de la guerre de nos adversaires. Ils auront à nous le restituer, et avec usure. Mais, en attendant, cela leur a permis de dépenser relativement moins que nous et nos alliés, d’autant mieux qu’ils avaient à leur disposition le fer et le charbon que nous sommes obligés d’importer partiellement à des prix très élevés.

Toutefois, l’effort financier qu’ils ont dû faire a tendu à l’excès les ressorts de leur crédit, et nous ne pensons pas qu’ils soient en mesure de procéder à beaucoup de nouvelles opérations d’emprunt. L’échafaudage des Caisses de prêt, la superposition d’une triple circulation de billets, la souscription de tranches successives de rentes et de Bons du Trésor au moyen d’avances consenties sur des litres de même nature antérieurement