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émis avec les mêmes artifices, constituent un ensemble peu solide. La mesure vraie de la situation financière est donnée par la dépréciation formidable de la monnaie nationale, du mark, dont la baisse, nous l’avons démontré, s’explique essentiellement par la méfiance universelle qu’inspirent, même aux neutres, les procédés du Trésor germanique.

Nous n’insistons pas sur la disette qui sévit en Allemagne et qui contribuera à l’effondrement. Mais, une fois la vie normale rétablie de l’autre côté du Rhin, il s’y trouvera une population nombreuse, disciplinée, habituée au travail et qui sera en mesure de produire annuellement une valeur susceptible de gager l’indemnité de guerre due aux Alliés. Certes, l’expansion teutonne ne reprendra pas son cours dans le monde comme elle le faisait si gaillardement jusqu’en 1914, avec le consentement tacite ou exprès du reste de l’univers. Nous, nos alliés et beaucoup de neutres, nous avons maintenant les yeux ouverts et nous ne laisserons plus ces « indésirables » s’asseoir à notre foyer. Avec un certain nombre de contrées, ils pourront encore commercer ; ils paieront, au moyen d’objets manufacturés, le supplément d’objets d’alimentation et de matières premières qu’ils auront besoin d’importer. Mais ils ne sauraient se flatter de retrouver chez nous et nos alliés les débouchés qu’ils s’y étaient assurés avant la guerre. Nous avons organisé et nous organiserons chez nous un grand nombre de fabrications pour lesquelles nous ne voulons plus être leurs tributaires. Leur industrie et leur commerce seront de ce chef notablement diminués. Voici, par exemple, la Compagnie nationale des matières colorantes, qui se prépare à produire, en France, pour nous et nos alliés, des marchandises que nous demandions jadis à l’Allemagne. La Compagnie générale de construction de locomotives, fondée sous l’égide d’un de nos grands établissemens de crédit et de deux de nos plus puissantes sociétés métallurgiques, nous affranchira d’une sujétion qui entraînait de graves dangers pour la défense nationale. Il y avait non seulement quelque chose d’humiliant à voir nos Compagnies de chemins de fer et notre réseau d’Etat confier des commandes aux usines germaniques ; mais c’était courir un péril évident que de dépendre d’un ennemi pour des fournitures essentielles. Désormais, l’Allemagne n’aura plus à nous compter au nombre de ses cliens sur ces divers domaines.