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et de deviner ce qu’il importe de ne pas tout à fait ignorer

L’ordre du jour dont il a été donné lecture à la reprise de la séance publique prouve que, dans le Comité secret, le débat s’est encore élargi ; que non seulement la question de gouvernement, la question de savoir s’il y a un gouvernement et où est le gouvernement, s’est superposée à celle, devenue secondaire, des passeports pour le voyage à Stockholm, et par conséquent que le fond même de notre politique intérieure a été évoqué ; mais qu’on a parlé des « buts de guerre, » ou des conditions de la paix, pour le jour, quelque incertain et lointain qu’il puisse être, où la paix sera possible ; de ses conditions, pas de ses moyens ; et par conséquent que l’on s’est occupé des directions mêmes de notre politique extérieure ; à ce point que l’objet primitif de la discussion, l’octroi des passeports, précédemment subordonné, a finalement été abandonné, éliminé.

Cet ordre du jour est ainsi conçu : « La Chambre des députés, expression directe de la souveraineté du peuple français, adresse à la démocratie russe et aux autres démocraties alliées son salut. Contresignant la protestation unanime qu’en 1871 firent entendre à l’Assemblée nationale les représentans de l’Alsace Lorraine malgré elle arrachée à la France, elle déclare attendre de la guerre, qui a été imposée à l’Europe par l’oppression de l’Allemagne impérialiste, avec la libération des territoires envahis, le retour de l’Alsace-Lorraine à la mère patrie et la juste réparation des dommages. Éloignée de toute pensée de conquêtes et d’asservissement des populations étrangères, elle compte que l’effort des armées de la République et des armées alliées permettra, le militarisme prussien abattu, d’obtenir des garanties de paix et d’indépendance pour les peuples, grands et petits, dans une organisation, dès maintenant préparée, de la société des nations. Confiante dans le gouvernement pour assurer ces résultats par l’action coordonnée, militaire et diplomatique, de tous les Alliés, etc. »

Et certes, une déclaration aussi solennelle eût pu être composée et écrite autrement. Quelqu’un aurait préféré dire : « La Chambre, approuvant l’attitude du Gouvernement, confiante en lui pour conduire énergiquement, avec le plein concours des Alliés, la guerre que la France a été forcée de subir, mais qu’elle est décidée à poursuivre jusqu’à une victoire qui lui assure, conformément à ses droits historiques, à ses intérêts politiques et économiques, aux conditions de sa vie dans le présent et de son développement dans l’avenir, les restitutions, les réparations et les garanties nécessaires ; résolue à n’accepter qu’une paix qui récompense le sacrifice héroïque d’une génération