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sur l’airain, et de nombreuses autres découvertes dont la liste remplit un cahier[1]. »

Dans l’expectative de ces heureuses réformes, les petits Français grandissent sans apprendre à lire : personne ne s’occupe d’eux pratiquement.

Les maîtres disparaissent ; beaucoup, par dévouement ou par attachement à leur emploi, auraient volontiers continué leur tâche ; mais on leur a imposé le serment civique : ceux qui s’y refusent sont expulsés de leur classe ; aux autres, qui s’y soumettent, les parens n’envoient plus leurs enfans. Les élèves vagabondent, et les représentans du peuple s’acharnent à disserter, en termes pompeux, sur l’insouciance lamentable de la monarchie. « Enfin, s’écrie Lakanal, en brumaire an III, il est décidé que l’ignorance et la barbarie n’auront pas le triomphe qu’elles s’étaient promis !… » On l’avait déjà décidé cinq fois !… Pourtant, de ce fatras, subsiste un grand principe dont il faut faire honneur au même Lakanal : la Convention proclama la liberté de l’enseignement, laissant aux particuliers le droit d’ouvrir des écoles sous la surveillance du gouvernement ; quant au choix des instituteurs, il n’exclut même pas les nobles et les prêtres : « Nommez les plus instruits ! » conseille-t-il dans un bel élan de libéralisme, dont les tracasseries administratives allaient aussitôt compromettre les heureux effets.


Quelques-unes de ces institutions libres de la Révolution méritent une mention. À la porte Saint-Antoine est située, en 1793, celle de la dame Roget, qui, adoptant la nuance en vogue, s’intitule « citoyenne républicaine. » Elle supprime de sa classe « les livres et les emblèmes entachés de superstition » et les remplace par des attributs plus « analogues aux circonstances, » ainsi qu’on disait alors. Cette opportune modification ne lui a pas porté chance, et voici en quels termes elle expose sa déconvenue aux « Pères de la Patrie : » « J’ai fait disparaître les image du fanatisme, remplacet par la Constitution et les droigts de l’homme, le bonet de liberté ; j’ai fais un feu de joie avec des gravures de roi et de reine. Des pères et des mères mont retiré leurs enfans, les uns sous des prétexe hon nette,

  1. Tourneux, Bibliographie de l’histoire de la Révolution, III, p. 537.