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Nous l’avons constaté en 1917 sur tous les champs de bataille, sans que le front russe absorbât certes de grosses disponibilités de l’ennemi. La balance ne cessera de s’améliorer, car la puissance industrielle de l’Allemagne et de ses alliés ne peut être comparée à celle de la Grande-Bretagne, des États-Unis et de la France réunis. Les ressources du monde entier sont à notre disposition, tandis que l’industrie allemande souffre d’un manque croissant de certaines matières premières. Au cours de cet hiver, la fabrication des usines de guerre a été entravée ; l’insuffisance de l’extraction du charbon, le manque de wagons sur les chemins de fer ont occasionné de sérieuses difficultés [1]. Dans cette guerre de matériel, l’avantage final ne peut pas ne pas rester à notre coalition.

On ne peut davantage contester que l’usure de nos adversaires, au point de vue des ressources alimentaires, ne soit extrêmement supérieure à la nôtre [2]. Aux personnes qui, dans les pays alliés, se lamentent de quelques restrictions, demandons de méditer les chiffres officiels de la ration hebdomadaire en Allemagne : 1 950 grammes de pain, 252 grammes de viande, 7 livres de pommes de terre (au lieu de 10 livres en 1917), 62 grammes de graisse (au lieu de 90 grammes en 1917). Encore savons-nous que souvent, dans la pratique, les distributions n’atteignent pas ces chiffres.

L’Allemagne trouvera-t-elle en Ukraine les denrées qui lui manquent pour rétablir une situation normale ? Des voix autorisées, en Allemagne même, ont répondu négativement. La Russie, épuisée par la guerre, ne possède plus en céréales et en bétail que des réserves de faible importance ; il n’est pas certain que la récolte à prévoir pour cette année suffise aux besoins du pays. Même en admettant l’existence de réserves, il faudrait, pour décider les paysans à les vendre, leur apporter en échange les produits manufacturés dont ils ont un urgent besoin, et que l’industrie allemande, absorbée par les fabrications de guerre, a cessé de fabriquer pour l’exportation [3]. Les transports russes sont à réorganiser. Contentons-nous de penser

  1. Il y a crise grave sur les laines, sur les cotons, sur les lubrifians indispensables à toute industrie.
  2. Il est certain qu’au début de la guerre beaucoup de gens en France, et des plus autorisés, avajent fondé sur le Blocus des espoirs exagérés. Mais aujourd’hui les cris de détresse qui viennent d’Allemagne ne sont pas niables.
  3. D’après un article de Hans Vorst, dans le Berliner Tageblatt du 16 février.