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notre insuffisance en artillerie lourde courte, ils se révélèrent, dans la préparation des attaques, le meilleur outil de destruction des premières lignes ennemies ; tranchées et réseaux barbelés furent déblayés par les mêmes tirs. Aujourd’hui les réseaux de fil de fer sont restés pour nos lignes une protection indispensable contre les surprises ; mais on peut dire qu’ils ne sont plus un obstacle à une attaque montée, car, avant que les vagues d’assaut n’abordent les lignes adverses, leurs fils de fer ont été détruits ou présentent des brèches suffisantes.

Contre le réseau des tranchées et les organes multiples de défense qu’il abrite, chacune des grandes actions de la guerre a vu augmenter la puissance des moyens d’artillerie employés à la préparation et à l’appui des attaques. Le nombre des pièces, leur rapidité de tir, leur calibre, l’efficacité de leurs projectiles s’accroissaient parallèlement. Pour échapper à cet ouragan d’explosions, qui nivelle les obstacles et laboure le sol de ses entonnoirs jointifs, le défenseur multipliait les abris profondément enterrés, ou recouverts d’une épaisse carapace en béton. Sur certains points de notre front, les Allemands avaient creusé des tunnels étendus, à entrées multiples, qui formaient une véritable forteresse souterraine correspondant à leurs tranchées de surface. En dernière analyse, la violence des « pilonnages » d’artillerie, l’habileté manœuvrière de l’attaque ont toujours pris le dessus. Souvent les vastes abris créés par le défenseur nous ont valu la capture de nombreux prisonniers.

Les lignes de défense se sont multipliées et échelonnées en profondeur, pour forcer le canon ennemi à disperser son effort ; même le défenseur est sorti de sa tranchée pour occuper et organiser sommairement les entonnoirs creusés par les projectiles de gros calibre ennemis. Contre cette nouvelle méthode de défense l’artillerie a trouvé des procédés d’attaque nouveaux. A la préparation devenue insuffisante elle a suppléé par un accroissement de violence des tirs d’accompagnement qui précèdent et couvrent les vagues d’assaut, des tirs d’interdiction et d’encagement qui isolent les défenseurs de l’arrière, leur interdisent d’être renforcés ou ravitaillés et barrent le chemin aux contre-attaques.

En fin de compte, aujourd’hui comme au début de la guerre de tranchées, le plus redoutable obstacle à la progression d’une attaque est la présence de quelques braves, de quelques hommes