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A l’extrême Nord, le village de Frise restait tapi dans la vallée de la Somme, au fond d’une sorte de poche que fait la rivière. On y accède, dans les terrains bas luisans de verdure et d’eau, par une route qui vient d’EcIusier et qui suit le thalweg, dans un paysage touffu. Le 2, la gauche du corps colonial, en fin de matinée, manœuvra à déborder le village par le Sud ; à midi il était atteint, et l’on y prenait une batterie de 77 en bon état ; puis les troupes, suivant leur élan, poussaient jusqu’au Nord du bois de Méréaucourt. D’autres troupes passaient au Sud du bois, qui était ainsi enveloppé complètement.

La seconde ligne allemande s’appuyait à la Somme à l’Est du bois de Méréaucourt, vers le bois du Chapitre. De là elle se dirigeait au Sud, s’appuyait à Herbécourt, puis plus au Sud à Assevillers, et enfin à l’extrême Sud à Berny. Dans cette même journée du 2, Herbécourt était enlevé de front et tourné par le Nord ; une heure après le départ de l’attaque, les feux de Bengale qui annoncent l’occupation brûlaient sur les ruines de la dernière maison. Enfin à la droite, les abords d’Assevillers étaient atteints, et un bois était enlevé devant Estrées.

Ainsi le 2 au soir, la deuxième position allemande était enlevée dans tout le secteur gauche (Nord), de la Somme au Sud d’Herbécourt, tandis que dans le secteur droit les Français étaient au contact de cette seconde position. Le 3, le progrès continua, toujours par la gauche. Flaucourt, en pleine troisième position ennemie, était enlevé par un coup de main d’une audace extraordinaire. Une reconnaissance commandée par le capitaine d’état-major Dubuisson, de la 3e division coloniale, et composée du lieutenant Cervoni et d’une vingtaine d’hommes du 23e colonial, entrait dans le village, écrasé par le bombardement, où l’ennemi était terré dans ses abris. Avant qu’il ait pu sortir, le petit groupe des Français fouille les maisons, les caves, les trous, les abris, et fait 130 prisonniers. Le 4 au matin, la cavalerie française patrouillait librement entre Biaches et Barleux. Au centre, Assevillers était emporté le 3. Au Sud, Belloy était enlevé le 4 par la légion étrangère. Enfin, à l’extrême droite du mouvement, Estrées était emporté le même jour par les troupes voisines.

Les troupes, qui ne voyaient plus d’ennemi devant elles, étaient enivrées d’ardeur. On avait vu l’artillerie amener ses avant-trains, et partir au galop à la poursuite de l’ennemi. Le 9,