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donc quadruplée quand la vitesse initiale est doublée. Il s’ensuit que, toutes choses égales d’ailleurs, pour porter à 120 kilomètres notre obus de 380, il faudrait lui imprimer une vitesse initiale d’environ 1 500 mètres. En réalité, il faudrait lui imprimer une vitesse bien moindre, car des deux actions antagonistes que nous venons d’examiner, il est bien certain que c’est celle de la raréfaction de l’air avec l’altitude qui l’emporte. — Il est donc probable qu’une vitesse de 1 300 à 1 400 mètres suffirait. — Mais les pièces de 380 ne sont point construites pour résister aux pressions que supposent de telles vitesses initiales. Les Allemands ont donc résolu cette partie du problème par divers artifices : ils ont adopté un calibre plus petit : 210 millimètres, et on a de bonnes raisons de supposer que le canon qui nous intéresse a été obtenu en retubant un tube de 210 dans un canon plus gros, sans doute de 380, ce qui a fourni un tube beaucoup plus solidement fretté et capable, par conséquent, de subir une pression de poudre plus grande.

D’autre part la vitesse initiale dépend de la longueur du tube en fonction du calibre. Cette longueur jadis toujours faible à cause de l’imperfection des poudres noires a augmenté peu à peu (sauf dans les obusiers et mortiers) et elle est couramment de 50 et 60 calibres dans les pièces marines. C’est devenu possible grâce à la progressivité des poudres pyroxylées qui peuvent être préparées en paquets brûlant progressivement à mesure que le projectile s’éloigne vers la bouche et achevant de brûler lorsqu’il sort du canon. Si le 210 dont nous parlons a été retubé dans un 380, il aurait à peu près 100 calibres de longueur, ce qui contribuerait à assurer à l’obus une grande vitesse initiale.

Enfin dans la construction même de l’obus les Allemands ont réalisé (comme le prouve l’examen des fragmens recueillis) une idée depuis longtemps expérimentée en France et qui, en contribuant à augmenter la vitesse initiale, facilite l’ascension rapide de l’obus dans les couches atmosphériques raréfiées : c’est la rayure préalable de l’obus dans l’acier de sa surface extérieure. Il est certain en effet qu’en rayant d’avance, dans sa paroi même, un obus, au lieu de lui adjoindre la classique ceinture en cuivre qui est rayée à forcement, au moment du départ, on obtiendra les avantages suivans’ : 1° l’effort de ce forcement qui tend à ralentir la vitesse initiale est supprimé ; 2° l’obus étant guidé dans la pièce sur une grande partie de sa longueur et non plus sur l’étroite bande de la ceinture et pouvant d’ailleurs y tourner plus vite (sans le risque de décollement de la