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LE THÉÂTRE
DE
M. FRANÇOIS DE CUREL

Carrière exceptionnelle, œuvre singulière, personnage énigmatique. Des échecs retentissants qui n’ont pas desservi sa renommée ; des pièces fameuses et passionnément discutées ; des succès qui ne furent pas des triomphes, mais qui, moins bruyants et moins populaires, apparaissent d’une qualité plus rare et plus solide. Un homme de vieille race, ingénieur et poète, à qui rien de moderne ne demeure étranger et qui, dans une âme d’aujourd’hui, garde la nostalgie du passé ; un observateur impitoyable et désenchanté, un ironiste amer, à la manière brutale du premier Théâtre-Libre ; un moraliste attendri et mélancolique ; un orateur enthousiaste, un penseur aux aperçus magnifiques, mais sans doctrine ; un dramaturge habile, vigoureux, puis, déconcertant de gaucherie ; un artiste scrupuleux, épris de succès et dédaigneux de réclame ; ces traits divers composent à M. de Curel une figure complexe, séduisante à la fois et irritante. Essayons d’en donner quelque idée, au lendemain de la brillante élection par laquelle l’Académie française vient de consacrer le talent de l’écrivain.


I. — LES SUJETS

On a souvent fait deux parts de son œuvre : les pièces psychologiques ( l’Envers d’une sainte, l’Invitée, la Figurante,