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appelé à Versailles. Enfin, lorsqu’on demanda aux habitants du pays rhénan leur adhésion à la France révolutionnaire, en 1793, les Sarrebrückois rédigèrent une adresse enthousiaste, où ils déclaraient ne faire avec les Français qu’ « une seule et même famille, réunis de cœur et d’affection à la France, notre mère patrie. »

L’état de choses consacré par le traité du 30 mai 1814, en ce qui concerne Sarrelouis, Sarrebruck et Landau, était donc en conformité avec la tradition régionale et les usages de la vie courante, et il donnait satisfaction aux vœux des populations. Sarrebruck fut rattaché au département de la Moselle et à l’arrondissement de Sarreguemines. Le sage et dévoué Rupied qui avait exercé la charge de maire sous l’Empire, un instant chassé par l’invasion, reprit ses fonctions sous la première Restauration.

A l’exception de quelques agités que le gouverneur prussien de nos départements rhénans envahis, Justus Grüner, d’Osnabrück, avait réussi à grouper, les Saxrebruckois s’estimèrent heureux, en restant Français, de voir close l’ère des guerres, et d’être délivrés de l’invasion austro-prussienne et russe.

L’arrangement territorial du 30 mai 1814 eût sans doute été toujours respecté si, après s’être transportés de Paris à Vienne, les plénipotentiaires de la Sainte-Alliance qui remaniaient la carte de l’Europe et distribuaient, sans l’ombre de scrupule, aux « principions » allemands les peuples frappés d’hébétude par la plus violente des secousses, n’eussent eu la malencontreuse idée d’installer les Prussiens sur la rive gauche du Rhin. On sait qu’après avoir, un instant, songé à constituer la Province rhénane en royaume pour le roi de Saxe, le Congrès de Vienne, sur la proposition de Talleyrand, mit la Prusse à notre place, dans nos départements rhénans, les anciens Electorats ecclésiastiques, — la rue des curés, comme on les appelait, — qu’on ne pouvait songer à reconstituer, mais où les Prussiens n’avaient aucune tradition, aucune attache et étaient, par avance et sur leur lointaine réputation, exécrés. Cet acte du traité de Vienne fut arrêté dans sa teneur définitive (art. 25) le 9 juin. 1815, neuf jours avant Waterloo.

Talleyrand avait pourtant écrit dans ses Instructions pour le Congrès de Vienne : « En Allemagne, la domination à combattre est celle de la Prusse : la constitution physique de