Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 49.djvu/176

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

débattre les conditions avec eux, leur offrir des garanties vis-à-vis d’un industriel inconnu qui habite au delà des mers, assurer leur rapatriement futur et garantir cet industriel à son tour contre l’impossibilité de retrouver un malhonnête ouvrier disposé à déserter après avoir touché sa prime.

La recherche d’une nombreuse main-d’œuvre étrangère provoque, en même temps, des conversations diplomatiques, qui vont devenir de plus en plus délicates avec la concurrence prévue pour la main-d’œuvre. Dès à présent, on constate, notamment, chez nos voisins d’Italie et d’Espagne, des dispositions à paralyser l’émigration, surtout si elle est susceptible de devenir durable. Nous avons cependant un bon argument à invoquer pour triompher de ces répugnances, c’est le milliard annuel que les émigrants d’Italie envoient de l’étranger dans leur pays. D’autre part, lors même que les pays étrangers acceptent le principe de l’émigration, ils montrent une préoccupation très légitime de protéger leurs nationaux, de les garantir contre le risque de chômage, de leur assurer des soins en cas d’accident ou de maladie et, parfois, de faciliter leur rapatriement. A cet égard, ils se trouvent tout à fait d’accord avec les syndicats ouvriers de France qui, de leur côté, pour protéger la main-d’œuvre française, exigent que l’ouvrier étranger reçoive, sous toutes les formes, un salaire au moins équivalent au leur. L’employeur a du reste lui-même, indépendamment de l’humanité, tout avantage à bien traiter les étrangers pour assurer le succès des embauchages futurs.

Malgré cette observation, nous ne saurions oublier, dans les négociations de ce genre, que, s’il y a service réciproque comme dans tout échange commercial, néanmoins les étrangers venant travailler en France ne sauraient être considérés comme ayant besoin de nous plus que nous n’avons besoin d’eux et, quand même les traités nous le permettraient, il serait absurde de leur imposer, ainsi qu’on l’a parfois suggéré, des mesures restrictives, comme l’obligation d’un service militaire, ou le payement d’une taxe (interdite d’ailleurs en général par des lois de réciprocité).

Ces premiers points étant résolus, l’Etat français doit encore intervenir dans l’immigration pour surveiller et réglementer l’introduction et le séjour des étrangers en France. Tous les pays, où l’immigration est un peu forte, prennent des précautions