Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 49.djvu/221

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nous est précieuse. Aucune supercherie, c’est trop évident ; et aucune adresse, non plus : une parfaite loyauté. Puis, dans le récit, dans la discussion, la joie d’observer que la France avait raison.

Eh ! diront les érudits allemands, c’est bien malin ! la vérité vous était favorable. S’ils le disent, c’est tout ce qu’on leur demande.

L’Alsace est devenue française au XVIIe siècle. Or, la France ne songeait pas à conquérir l’Alsace ; mais l’Alsace est allée volontairement à la France, qui même a d’abord fait quelques difficultés pour la recevoir. La maison d’Autriche, en ce temps-là, prétendait s’emparer de toutes les Allemagnes, afin de constituer une Puissance à laquelle le reste de l’univers n’eût qu’à céder. Le roi de France, pour entraver cette ambition redoutable, aidait les princes allemands à garder leur indépendance ; il était ainsi le protecteur des libertés germaniques. Ses troupes avaient parfois l’occasion de traverser l’Alsace, quand il leur fallait secourir un allié, de l’autre côté du Rhin. Lesdites troupes n’étaient pas mal disciplinées et, en somme, se conduisaient assez bien durant le passage : un chroniqueur de Haguenau écrit : « Ces gens ont laissé ici une bonne mémoire. » En 1633, les Suédois et les Impériaux se battaient en Alsace et dévastaient le pays terriblement. Louis XIII envoya le maréchal de la Force avec une armée seconder à Philippsbourg l’électeur de Trêves. Cette armée passa par le comté alsacien de Hanau, entre Phalsbourg et Haguenau. Le comte de Hanau pria les Français de le protéger contre les Suédois et les Impériaux : ils occuperaient ses trois bourgs de Neuweiller, Ingweiler et Buchsweiler ; et le comte de Hanau rendrait hommage au roi de France. Les juristes de la couronne examinèrent la question. Comme les trois bourgs dépendaient de l’évêché de Metz, qui était sous la souveraineté du Roi, le Roi consentit. Le colonel de la Bloquerie eut l’ordre du maréchal d’envoyer quatre mille hommes. Et les Suédois se fâchaient, lorsque les populations de Hanau firent nettement voir que le protectorat de la France était à leur gré.

Bientôt, le comte de Salm, qui administrait l’évêché de Strasbourg, tenta une démarche analogue à celle du comte de Hanau. Il s’adressa au maréchal de la Force et conclut avec lui un traité aux termes duquel Haguenau, Saverne et les dépendances de ces deux villes étaient placées sous la protection de la France. Mais voilà, dira-t-on, l’initiative d’un comte de Salm inquiet de ce que font devant Saverne les Suédois sous le commandement du rhingrave Othon-Louis ? Sans doute ! Seulement, le maréchal de la Force eut à cœur