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C’est décidément une obsession, une hantise. Dans leurs interrogatoires, leurs blessés reproduisent la mensongère légende. En juin 1919, un albatros allemand fut abattu par les nôtres, dans la montagne de Reims. Le lieutenant observateur Kurt Tzollhorn, blessé, affirma à M. B…, prêtre brancardier au 38e corps, qui lui reprochait leur acharnement à bombarder sans raison la Cathédrale qu’il savait à quoi s’en tenir, qu’il avait « vu de ses yeux, lui, en survolant Reims, non seulement le poste sur les tours, mais les batteries encadrant la Cathédrale ! » Et rien ne put l’en faire démordre. Mais celui-là est Allemand. En mai 1918, l’agence Wolff exhiba un témoignage qui paraissait moins suspect et « ne pouvait être récusé, » disait-elle : « Un officier français, Édouard-Albert de Bondelli, avouait que, jusqu’en avril 1917, il avait dirigé le poste d’observation sur la Cathédrale. » Or, après enquête, le Journal de Genève retrouva en effet les traces de cet officier, Édouard-Albert de Bondelli, mais il était mort en 1910, à l’âge de quarante-neuf ans, laissant deux fils dont l’un, à l’armée, n’avait pas encore été sur le front en avril 1917 et dont l’autre n’est pas en âge de servir.

L’enquête du colonel Feyler, dont le même journal a donné le procès-verbal, le 3 août 1918, a un autre poids. Le communiqué allemand du 11 mars affirmait qu’un poste d’optique a plusieurs fois fonctionné sur la Cathédrale. Le lendemain, deux parlementaires, MM. Abel Ferry et Renaudel, étaient venus à Reims pour se rendre compte de visu : ils constatèrent l’inanité de l’accusation. Le cardinal, de concert avec l’autorité militaire, avait encore opposé une dénégation formelle, expliquant, très