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de la ville, on fait des perquisitions sévères dans la maison qu’habite le capitaine de frégate Bonafous-Murat, et, si ces mesures ne procurent point à M. le comte de Lardenoy l’arrestation du Roi, elles empêchent Bonafous de prendre la barque, d’aller chercher son oncle au rendez-vous, et de le conduire en rade. Après avoir attendu plusieurs heures, le navire, sur lequel Rocca-Romana et Rossetti étaient montés comme simples passagers, au même titre que le général Verdier, et divers officiers de son état-major, fait voile pour le Havre. Il emporte les bagages et l’argent du Roi. Il n’y eut là ni trahison, ni défection : simplement des contretemps fâcheux, mais explicables. Seulement, Murat eût pu remarquer, lui, l’homme jadis constamment heureux, que, depuis son arrivée en France, rien ne lui réussissait.

Cependant le marquis de Rivière, qui, en l’an XII, avait dû la vie à l’intervention de la princesse Caroline, et qui, à présent, tenait en ses mains l’existence de Murat, ne semblait point avoir formé contre lui de mauvais desseins, tout au contraire. Il n’avait été pour rien dans le mouvement insurrectionnel qui s’était produit, le 25 juin, à Marseille, dont, le 10 juillet seulement, il était venu assumer l’administration nominale et où il s’était montré impuissant non seulement à retenir, mais même à modérer les esprits. Les officiers qu’il avait nommés, les troupes qu’il avait rassemblées, les paysans qu’il avait insurgés, échappaient à ses directions pour suivre les pratiques d’une populace qui ne pouvait être contenue que par des méthodes d’efficace sévérité. Il se trouvait sans moyens, sans forces et sans énergie morale, en présence de crimes dont on ne saurait le rendre responsable. On l’a accusé d’avoir « promis 48 000 francs de récompense à celui qui livrerait l’ex-roi, mort ou vif, » de lui avoir tendu un piège en essayant de faire son complice de Joliclerc, et d’avoir destitué celui-ci sur son refus : tout cela est faux, et c’est à bon droit que, dans les mémoires publiés sous son nom, on a allégué le contraire.

Le 14 août, Joliclerc a écrit au duc d’Otrante : « L’autorité militaire a continué à rechercher ici avec beaucoup d’activité le roi Murat, on a fouillé plusieurs maisons dans la ville et dans la campagne. Des gens zélés, dans plusieurs communes rurales, ont aussi fait des démarches et des courses à cette occasion, de sorte que, si ce personnage était trouvé par de