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Un nuage montant de l’abime aux étoiles
Couvrait cette innombrable armée en marche, voile
Où transparaissaient par instant
A travers un brouillard crevé par les blasphèmes,
La face de la Bête et ses dix diadèmes,
Forgés aux bagnes de Satan.

C’était là tout l’Enfer, et sa dernière fête.
Car la seconde était venue, où la défaite
Retournerait son sablier,
Le moment dans le temps et le lieu dans l’espace
Où l’Éternel marqua la borne, que ne passe
Le cheval ni le cavalier.

Car nos cloches, sachant les douze heures frappées,
Se turent, délivrant d’invisibles épées,
Et le silence fut témoin
Qu’en cet orage rouge échevelant la nue,
Une voix, prononçant la Sentence obtenue,
Disait : « Tu n’iras pas plus loin ! »

Toi que le Tentateur mena sur la Montagne,
Pour te promettre, au prix de ton âme, Allemagne !
L’Empire du Monde à tes rois,
Et que Hotte à jamais, sur la vague ou la glèbe.
L’ombre de tes drapeaux, blasonnés par l’Erèbe,
Avec des ténèbres en croix.

Et tu reculeras pas à pas, faisant tête.
Vers les bauges de tes aïeux, sous la tempête
Noire des malédictions
De l’unanime humanité qui te renie,
Princesse du Mal, goule de Germanie,
Toi ! l’Antéchrist des Nations ! »




Salut ! Nuit vengeresse, où la sainte justice
Rompit le cours de l’astre infernal, au solstice,
Et rendit au Droit ses faisceaux,