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demoiselle Paravicini[1] s’honora en venant embrasser son oncle et lui offrit sa maison. Le Roi, pour des raisons d’étiquette, refusa les appartements qui lui étaient proposés, et se logea dans une auberge agréable et commode. Le commandant provisoire de la citadelle, le commandant Cauro, ci-devant chef d’escadron au service de Naples, soit par inclination, et comme par crainte d’éveiller la guerre intestine, ne fît aucun mouvement, tint renfermés avec lui, les quelques soldats qu’il avait à ses ordres, et attendit les événements.

À quelle résolution Murat allait-il s’arrêter ?

Allait-il, comme il semblait à quelque moment s’y être résigné, se rendre à bord de la frégate anglaise où il se croyait certain d’être accueilli ? Consentirait-il à rejoindre à Trieste la Reine et ses enfants ? Suivrait-il, après son voyage triomphal en Corse, le dessein qui sembla quelque moment avoir traversé son esprit, et auquel il eût trouvé des facilités, de s’établir en Corse et de s’y former une sorte d’État indépendant ? Un bon juge, le général Simon, écrit à ce moment même : « On a grand soin de répandre le bruit que, quoique couvert de haillons, le roi Joachim apportait beaucoup d’argent. Il n’en faut pas davantage en Corse. Ajaccio ne peut pas être considéré comme entièrement soumis, puisque la citadelle seule a arboré le drapeau blanc, et que le peuple porte la cocarde tricolore dans la ville ainsi que dans tout le ci-devant département du Liamone. Il y a, en Corse, un grand nombre de militaires de tous grades qui reviennent sans solde ni pension du service de Naples, et qui n’attendent qu’un appel pour courir encore à leur ancien chef ; il y en a un plus grand nombre encore qui sortent du service d’Italie, ou de France, et qui n’ont pas de traitement, ou qui ne sont pas payés depuis longtemps de celui qui leur avait été accordé ; le peu de troupes qui sont dans les places sont corses. Elles ne sont pas payées ; elles vont se trouver sans officiers, et elles sont peu disposées à obéir à ceux qu’on leur donnera, et surtout aux ordres d’un homme tel que M. Galloni, actuellement chef d’État-major de la division. Les

  1. Renuccî écrit : Paravissini. Il s’agit de Maria-Antonia (Lætitia) Paravicini née à Ajaccio le 19 novembre 1801, morte à Ajaccio le 18 avril 1890, mariée le 9 octobre 1811 à Jean-Marie-Tiburce Sébastiani. alors colonel, plus tard maréchal de camp (1823 ;, vicomte (30 juin 1830), lieutenant-général et pair de France. Dans son testament, l’Empereur l’avait destinée au général Drouot.