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Qui, dit-on, communique au château de Compiègne
Par un long souterrain creusé sous l’autre règne,
Puis comblé, puis refait enfin par Mazarin.
La Reine et lui, seuls, ont les dés du souterrain…
C’est là que se lit, grâce aux dispenses de Rome,
Le mariage obscur qui la lie à cet homme…


Le souterrain aurait eu près de vingt kilomètres de longueur. Le Plessis-de-Roye aurait donc abrité les amours de la Reine et du cardinal. C’est là que les conspirateurs, après avoir délivré le Masque de fer enfermé à Pierrefonds, conduisent le mystérieux adolescent ; car ce vieux château est plein de repaires profonds :


… Maison construite loin des villes,
Faite pour se cacher dans les guerres civiles…


au Sud du chemin de Montdidier à Roye.

Tout n’est point faux dans la description de Victor Hugo, et pas même le souterrain, lequel, selon la tradition, existait parfaitement, non pour déboucher à Compiègne, mais, plus modestement, pour relier le château à la tour Roland, qui se dresse au Nord-Ouest de Lassigny. Trop bien comblé, il fut impossible d’en découvrir l’entrée ; sans quoi, au cours de la guerre, nos troupes auraient peut-être pu surprendre l’ennemi dans cette tour Roland. Ce qui a pu faire croire au poète-historien que le château du Plessis-de-Roye était un manoir ruiné sous Mazarin, c’est que le Roi le fit saisir et vendre au temps de la Fronde, pour punir le prince de Condé de son insurrection. Un marchand de biens l’acheta, mais pour le revendre aussitôt aux Héricourt, vieille famille de Picardie. Le domaine changeait de maître, sans rien perdre de sa splendeur. C’était une demeure somptueuse, entourée de douves que traversaient des ponts, avec une poterne d’entrée et un pavillon des gardes ; elle couvrait un vaste espace de son corps de logis flanqué de tours et tourelles aux toits en pente, aux flèches aiguës, et d’une aile au fronton arrondi. Dans le parc entièrement clos de murs et qui monte, par une inclinaison d’abord lente, puis assez forte, au Sud-Ouest, dans la direction du bois de la Réserve, étaient aménagés des pelouses, dos bois, des allées. C’était cela, hier encore, avant la guerre.

Car les siècles n’y avaient point touché, sauf pour consolider