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religieuse, qu’il présiderait la distribution des prix de tel collège de la ville ou de la montagne auquel l’évêque portait un intérêt particulier.

Hé quoi ! tant de cérémonies seront-elles obligatoires ? Vaudront-elles le temps qu’il y faudra passer ? Comme ses prédécesseurs, le consul l’a cru. Sous le régime turc, en cet Orient tout imprégné de théocratie, où la moindre église ayant son rite et sa hiérarchie groupe autour d’elle un petit peuple jaloux de sa personnalité, chacun de ces évêques est encore, pour ce petit peuple qui est son peuple, un chef national en même temps que religieux. Viennent certaines fêtes solennelles, certains dimanches du temps pascal, dans l’Église maronite de Beyrouth et dans l’église grecque-melchite, c’est vraiment la cœur d’une petite nation que l’on sent battre.

Qui pourrait demander pourquoi le consul de France est là ? Il y est parce que cette petite nation, asservie et toujours menacée, trouve dans la sollicitude visible de la France une garantie et une joie. Les honneurs dont il y est entouré sont un remerciement qu’elle fait à la France, un engagement mutuel qu’elle renouvelle avec la France. Dans la grande salle de la demeure épiscopale, devant les notables de la nation, la cérémonie se prolonge par des discours. L’évêque ne manque pas d’évoquer la vénérable figure du roi Saint Louis, voire celle de Charlemagne et se plaît à placer dans un lointain prestigieux les origines d’une protection française qui, depuis François Ier et Louis XIV, n’a plus guère connu d’interruption. Sans souci de quelques témoins peu sûrs qui se seront glissés dans l’assistance, une fois de plus ont été manifestés à tous les yeux, proclamés à toutes les oreilles les liens immémoriaux qui lient à la France les « Français du Levant. »

La plus nombreuse de ces petites nations, les Maronites, est aussi la mieux groupée, dans une même région du Liban, autour de son chef, son patriarche. Ce dernier doit à cette circonstance, comme au voisinage de Beyrouth où réside le consul général de France, une somme plus grande de liberté. Il tient à honneur de ne pas solliciter de la Porte, à la différence des autres patriarches, un bérat reconnaissant son titre patriarcal, Et, s’il a pour le gouverneur du Liban les égards nécessaires, il n’est jamais descendu de sa montagne pour le visiter.

Le consul français, selon l’usage, lui a fait bientôt sa visite