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coordonnant tous les droits. Si un organisme international, une commission où seraient représentés tous les intérêts religieux en cause, était chargée de veiller à l’application de ce statut, la France ne saurait se refuser à en exercer la présidence. Instituée dès le temps de Charlemagne gardienne et protectrice des Lieux-Saints pour la chrétienté, alors unie, elle s’est acquittée, au cours des temps, de cette mission à travers des difficultés obscures et souvent ingrates, mais avec une continuité, une suite qui ont singulièrement contribué à fonder son autorité morale en Orient. — Ne nous y trompons pas : c’est bien là la pierre angulaire sur laquelle nous avons bâti. — Son mandat tant de fois séculaire, la France s’en acquitte aujourd’hui encore ; et il répond si bien à des besoins profonds que même un accident tel que la rupture des relations diplomatiques entre elle et le Vatican n’a pu en interrompre le cours. Le Décanat dont elle serait investie donnerait une consécration nouvelle à son rôle historique que faciliterait singulièrement désormais la codification des droits de chacun.


Parlant à la Chambre, le 11 novembre dernier, dans une heure d’émotion suprême, M. Clemenceau a trouvé dans son cœur ce beau cri de fierté nationale : « La France, autrefois soldat de Dieu, aujourd’hui soldat de l’humanité, soldat de l’idéal toujours ! »

Alors que les représentants des Puissances s’apprêtent, en posant pour l’univers politique les fondements d’un ordre nouveau, à donner d’un consentement unanime à l’œuvre légitime de chaque nation, de chaque âme de peuple, une auguste consécration, on aime à recueillir cette grande parole où s’unissent les échos, proches et lointains, de nos gloires les plus pures. On y voit la promesse que, dans cet Orient où elle avait gagné ce titre de « soldat de Dieu, » la France, « soldat de l’idéal toujours, » ne se verra pas frustrée, à l’heure du destin, de la part la plus idéale de son héritage. Ayons confiance qu’un digne couronnement va être donné en Syrie à l’effort le plus généreux peut-être et le plus constant dont s’honore sa magnifique histoire.


SAINT-RENÉ TAILLANDIER.