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sujets de romans et dont nous dirons les noms en parlant bientôt de ses collaborateurs, il s’était épris de la figure, alors quasi légendaire, — la captivité de Marie-Antoinette à la Conciergerie n’ayant été historiquement étudiée que beaucoup plus tard par M. Campardon, — il s’était épris de la figure de ce gentilhomme qu’on disait être respectueusement amoureux de la Reine et qui risqua sa vie pour pénétrer chez la prisonnière afin de l’aviser d’un projet de délivrance. Ce thème succinct, appuyé de quelques lignes d’une brochure publié » en 1817 par l’ex-municipal Lepitre, suffisait à Dumas et le journal La Démocratie pacifique dans lequel il se proposait de publier son feuilleton, annonça la nouvelle œuvre à la date du 26 janvier 1845 et sous ce titre : Geneviève épisodes de 1793.

L’avis se répète, dans les mêmes termes, jusqu’au 23 février, date où le futur roman s’intitule le Chevalier de Rougeville, épisode de 1793, modification d’où l’on peut conclure que l’œuvre n’était pas commencée et que l’auteur hésitait encore, sinon sur le sujet, du moins sur le choix du personnage principal. Il reçoit, dans la semaine qui suivit cette dernière annonce, une lettre, écrite par le fils du chevalier de Rougeville, quelque peu inquiet de voir le nom de son père affiché dans un journal dont les tendances passaient alors pour « avancées. » Dumas répond que, pour calmer ces filiales alarmes, il change le titre de son récit : en effet, la Démocratie pacifique insère, à la date du 1er mars, ce nouvel avis au lecteur : « Nous avons à notre disposition les deux tiers du roman de M. Alexandre Dumas qui ne fera pas moins de trois volumes et qui aura pour titre le Chevalier de Maison-Rouge. »

Dumas a conté que, peu de jours plus tard, — les aventures plaisantes ou tragiques naissaient sous chacun de ses pas, — lui parvenait une nouvelle lettre du même personnage, lettre ainsi conçue :


« Monsieur,

« Appelez votre roman comme vous voudrez ; je suis le dernier de la famille et je me brûle le cervelle dans une heure.

« DE ROUGEVILLE,

« Petite rue Madame, no 3. »


La chose est si romanesque, si bien dans « la note » de Dumas, qu’il serait permis de croire à quelque enjolivement de