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LES ÉTAPES D’UNE GLOIRE RELIGIEUSE
JEANNE D’ARC

I
L’ÊGLISE AU XVe SIÈCLE ET LA MISSION DE JEANNE

Une fille de France, qui, jadis au nom d’une prédestination religieuse, réalisa comme une mission religieuse le salut de sa patrie, est désormais qualifiée de sainte par l’autorité romaine. Un saint Canut en Danemark, un saint Etienne en Hongrie, en Castille un saint Ferdinand, furent des héros nationaux qui, tout en même temps, dévouèrent leur vie aux intérêts de l’Église : les honneurs qu’ensuite elle leur décerna mirent en lumière, non pas les services qu’ils rendaient à leur peuple, mais les services qu’elle-même leur devait. Tout autre est la carrière de Jeanne d’Arc. La grande obligée de cette jeune fille, la puissance qu’elle servit pour servir Dieu, ce fut la France ; et de ses déclarations l’Eglise a conclu que son devoir même d’état, imposé par ses « voix, » l’amenait à se comporter en héroïne nationale.

Le verdict du pape Benoît XV achève et couronne un travail de près de cinq siècles, presque aussitôt interrompu par une abominable tragédie, et souvent retardé par de longues périodes de lenteur, mais qui ne fut jamais complètement déserté, et qui s’opéra, simultanément, dans l’opinion des hommes d’Eglise et dans la conscience du peuple chrétien. Nous voudrions assister aux divers épisodes de ce travail, écouter parler