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Un autre signe de prospérité que M. Helfferich relevait était le chiffre des émissions de valeurs mobilières, fonds d’État, obligations et actions, qui, de 1886 à 1913, ont atteint 68 milliards de francs, avec une moyenne annuelle de près de 4 milliards à la fin de la période, il faisait d’ailleurs remarquer avec raison que ce montant était loin d’être celui de l’accroissement annuel de la fortune nationale. Ce n’est qu’une partie de l’épargne qui se place en nouveaux titres ou qui va grossir les dépôts de banque et des caisses d’épargne. Bien des entreprises autres que les sociétés anonymes augmentent leur capital et leurs moyens d’action ; beaucoup de particuliers développent leur outillage en complétant leurs installations. Le taux de l’accroissement de la richesse générale, qui était de 4 pour 100 en 1913, avait atteint plus de 10 pour 100 en 1913.

Au cours des quinze années 1897-1912, alors que la population s’était accrue de 28 pour 100, le capital possédé par elle avait grandi de 50 pour 100 et la force productive du travail, en d’autres termes, la valeur du capital humain, avait cru dans la proportion de 50 pour 100. Si, d’autre part, on recherche l’emploi fait par les Allemands de leur revenu total de 57 milliards, on trouve que 9 étaient absorbés par les budgets de l’Empire et des États, 34 par les dépenses personnelles des habitants ; 14 représentaient l’addition annuelle au capital préexistant. Tels étaient les chiffres proclamés a la veille de la guerre par un des premiers financiers d’outre-Rhin qui, en les présentant à ses lecteurs, s’écriait : « Voilà de quoi réjouir et exalter nos cœurs ! L’Allemagne s’est élevée à un niveau qu’elle n’avait encore jamais atteint ; elle s’est montrée égale aux plus puissants de ses concurrents. »

En même temps que M. Helfferich célébrait en termes pompeux l’expansion économique de l’Empire, beaucoup de ses compatriotes s’appliquaient à en calculer minutieusement les éléments. L’une des dernières évaluations de la fortune allemande faites avant la guerre l’a été par M. Steinmann-Bucher, qui avait dressé une statistique en six chapitres divisés comme suit :

1o Les propriétés mobilières et les immeubles bâtis, abstraction faite de la valeur du sol. — Le total en était établi d’après les sommes pour lesquelles ces objets étaient assurés contre l’incendie. L’ensemble des polices s’élevait, déjà en 1905, à plus de 200 milliards ; l’auteur du travail faisait observer avec raison que