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l’apologie de leur politique de guerre, tout en accablant le militarisme. C’est en vain que les démocrates reprochaient à l’ancien régime d’avoir annihilé les efforts de M. Wilson et déclenché la guerre sous-marine. La droite avait beau jeu et démontrait sans peine que toute cette enquête avait été organisée par la coalition et n’était qu’un plaidoyer pro domo ! Les manifestations en faveur d’Hindenburg et Ludendorff à Berlin ne pouvaient que nuire au prestige de la coalition ! Encore deux victoires pour le nationalisme : la démission d’Erzberger et l’impossibilité de l’extradition. Qu’en sera-t-il alors de ce prestige ?

La question militaire était plus insoluble que toutes les autres réunies. Dès la fin d’octobre, l’Assemblée nationale avait parlé d’organiser la Reichswehr. Tandis que la droite réclamait une armée forte, les indépendants dénonçaient la Reichswehr comme instrument de contre-révolution. La coalition, unanime à demander une armée républicaine, n’était même pas capable d’en éliminer les éléments monarchistes. Impuissant à satisfaire l’opinion troublée, elle laissait Noske résoudre le problème à sa manière, c’est-à-dire favoriser la réaction militariste.

A tant de difficultés s’ajoutait encore, vers la fin de décembre et au sein de l’Assemblée prussienne cette fois, un gros conflit entre le Centre et les socialistes au sujet de la composition des commissions scolaires. On voit ainsi dans quelle situation se trouvait, au début de 1920, la fameuse coalition. Aussi ses réflexions de fin d’année n’étaient-elles ni gaies, ni rassurantes. « Les idées nouvelles, disait la Frankfurter Zeitung, sont étouffées par les anciens préjugés, par la démoralisation générale, par la soif du gain, par tous les maux que la guerre a développés. » C’est que les idées nouvelles manquaient de vigueur et de clarté. Cette politique de compromis était débordée par les événements. Entre le danger de gauche et celui de droite, on risquait à tout instant de négliger l’un en combattant l’autre. Et, pour mettre un frein à la révolution menaçante, on préparait, non pas une milice républicaine, mais une armée réactionnaire, décidée à faire le jeu des partis de la droite.


III

Tandis que la coalition perdait peu à peu prestige et crédit, l’opposition se faisait plus précise et violente. Celle de gauche