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demeurait toutefois négative et laissait libre à celle de droite le champ de l’action positive.

Depuis longtemps, le socialisme indépendant se séparait toujours plus de la social-démocratie, qui perdait des partisans à son profit. Il avait tenu son premier congrès en mars 1919. Il en organisa un second en décembre, à Leipzig. Il définit à nouveau son programme et sa tactique. Car ce parti était de date relativement récente. C’est en août 1917 qu’il s’était constitué à Gotha. Et le radicalisme intransigeant dont il faisait preuve en décembre était, lui aussi, de fraîche origine. C’était pour la première fois qu’on parlait de rompre a jamais avec les majoritaires et d’affirmer avec énergie l’idéal révolutionnaire. Le parti n’avait pas toujours été aussi catégorique.

Le socialisme d’outre-Rhin avait, au moment de la guerre, cinquante années d’opportunisme. Dans l’Etat militaire et policier, son action n’avait été que parlementaire ou syndicale. A peine, vers 1905, les événements de Russie avaient-ils ému sa placidité. En 1914, il présentait ses masses organisées par une discipline qui imposait avant tout le payement régulier des cotisations, sa lourde armature bureaucratique, ses journaux et ses imprimeries et sa puissance financière. Et il s’engagera tout entier dans l’entreprise criminelle, derrière cette grande industrie et cette haute finance dont les ambitions flattaient ses espoirs secrets de lucre et de profit. On lui prêcha sans difficulté le droit de tenir, d’attendre la victoire finale. Mais de 1914 à 1916, on vit peu à peu grandir le nombre de ceux qui, prévoyant la catastrophe, protestaient contre la folie de la guerre. Dès octobre 1916 se forme, au sein de la social-démocratie, un parti d’opposition. Le conflit s’exaspère entre les deux fractions au cours de l’hiver 1916-1917 et, en avril 1917, le socialisme indépendant se reconstitue.

La révolution russe, qui éclatait au même moment, aurait pu le lancer dans les voies révolutionnaires. Mais, en 1917, l’impérialisme allemand conservait son prestige. Le jeune parti n’avait pas encore à se prononcer pour ou contre le réformisme. Il se contentait de combattre l’impérialisme, de protester contre les crédits de guerre. Jusqu’en novembre 1917, il aura contre lui la bourgeoisie, la social-démocratie et les syndicats. On l’accuse de trahir la patrie et c’est en vain qu’il s’oppose à la mobilisation civile. A partir de novembre, la