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quelle législation sociale veulent nous imposer les socialistes, au moment même où le bolchévisme russe fait machine en arrière et supprime les conseils d’entreprise ! La loi sera le signal d’un gaspillage économique sans précédent. Comment ne pas voir les bases de ce parlementarisme qui oblige les partis, pour de simples raisons tactiques, à trahir leurs principes essentiels ? Le parti démocrate comprend beaucoup de patrons et beaucoup d’ouvriers. Il donnerait volontiers raison aux patrons. Mais il veut éviter de rompre avec le socialisme. Ne voyez-vous pas que la loi sème l’agitation dans le monde économique et politique ? » Quand la loi sera votée, on dira qu’il faut absolument de nouvelles élections, une nouvelle Constituante ; que le vote a été une comédie et une duperie ; que tout s’est passé dans les coulisses. Après les incidents de Berlin, on montrera à la coalition qu’elle sait à quoi elle s’expose en radicalisant, par crainte du prolétariat, les entreprises et les exploitations.

Si la Droite nationale faisait ainsi preuve, dans l’opposition, d’une réelle unité de vues, elle n’était cependant pas parfaitement unie. Des divergences subsistaient entre les deux partis. Quand, vers le milieu de janvier, le député von Graese proposera leur fusion, il apparaîtra que cette fusion était aussi impossible qu’en octobre. Le parti populaire n’avait pas, sur l’unité allemande et l’antisémitisme, les mêmes opinions que les nationaux-allemands. Placé entre la coalition et l’extrême droite, il ne voulait pas rompre avec la première et s’y ménageait une porte d’entrée. Mais ces divergences n’empêchaient pas la Droite nationale da faire front contre le régime, d’agir sur les démocrates et le Centre, que les conséquences fatales de leur alliance avec le socialisme inquiétaient de plus en plus.

Protégée par ce travail de critique, l’agitation militariste grandissait. Au début d’octobre, Noske avait persuadé sans peine aux socialistes que la contre-révolution n’était pas à craindre. « Noske, disaient alors les Hamburger Nachrichten, est le plus intelligent des socialistes allemands. Il montre aux camarades comment on gouverne. Ne serait-ce pas favoriser la réaction, d’ailleurs, que de laisser les officiers sans emploi ? » Au moment même où triomphait ainsi la cause de Noske, la jeunesse nationaliste se faisait toujours plus remuante. « Elle a, disait-on, un sentiment de victoire, malgré la défaite extérieure. Fichte est son Dieu ; les Discours à la Nation allemande lui