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Bolivie et le Pérou, et la légation du Chili à Lima réclamait une déclaration de neutralité. Après avoir bien établi le but uniquement défensif du traité, le Gouvernement péruvien affirma son intention d’attendre les explications du Chili sur l’occupation d’Antofogasta, qui détermineraient son attitude. Mais il se refusa à déclarer sa neutralité. Sans attendre davantage, le Chili rompit les négociations, et le 5 avril déclara solennellement la guerre.


Les forces en présence ne correspondaient nullement à l’état de tension politique et à la valeur relative des belligérants.

On croit généralement que les chances de guerre augmentent avec le nombre de soldats sous les drapeaux ; or, dans les deux camps, l’effectif de l’armée était en diminution, sensible au Chili, très sensible au Pérou. Le Chili, pour une population de 2 500 000 habitants, n’entretenait en 1879 qu’une armée de 2 500 hommes, alors que peu d’années auparavant, il avait 3 300 hommes sous les armes. Mais la garde nationale de 25 000 hommes pouvait être portée à 55 000 hommes sur le pied de guerre. Le recrutement des troupes chiliennes est très homogène ; les Indiens Araucans s’y distinguent à peine des métis et ils gardent les fortes qualités guerrières de leurs ancêtres. L’armée chilienne est entraînée par les expéditions dans le Sud contre les peuplades encore rebelles et elle est bien instruite, car son commandement est tenu en dehors de la politique. Son armement est excellent. L’infanterie était armée du fusil français modèle 74 (fusil Gras) et du fusil Combain ; l’artillerie avait le canon Krupp, sauf quelques pièces lourdes Armstrong ; la cavalerie était excellente. Le Pérou, qui avait compté 12 000 hommes sur pied, n’en avait plus que 4 500 pour une population de trois millions d’habitants. Les Indiens Guetchuas, qui fournissent les fantassins de l’armée, sont d’une race autrefois guerrière, actuellement très soumise, mais qui retrouve ses qualités les armes à la main. Le Guetchua est sobre, endurant, tenace, courageux, très dévoué au chef qui l’aime ; bien encadré, il devient en peu de temps un excellent soldat.

Mais l’armement se ressentait de l’état des finances, et de la confiance qu’inspirait au Gouvernement l’alliance de 1874, à