Puis le groupe, comme si rien ne s’était passé, tranquillement s’achemina vers la salle de danse.
Aynaud-Marnière, un peu décontenancé de la façon désinvolte dont Mlle Deleuze l’avait offert à sa rivale, sortit de sa cachette et s’en fut, piteux, au buffet, car il avait pris chaud aux révélations qui lui avaient été prodiguées. Il y trouva le comte Moroni et, sans trahir le secret des jeunes filles, il avoua :
— Vous avez gagné, mon cher collègue.
— Sans doute, accentua celui-ci en faisant la roue. La victoire, il n’y a que la victoire. C’est pour l’avoir oublié que l’Europe est si mal à l’aise. Un bon diplomate doit connaître les femmes. Car les nations sont femmes, mon cher Aynaud-Marnière. Elles sont femmes. Donc, il faut les mener.
Huit jours plus tard, Maurice Aynaud-Marnière, son congé terminé, s’apprêtait à quitter le Palais de Neige, Gstaad, la montagne et la Suisse, et par surcroît miss Maud et Mlle Nicole.
Attardé dans le hall, il y guettait celle-ci qui devait à son habitude se rendre à la patinoire. Et, quand parut la jeune fille, c’est à peine s’il osa l’aborder. Il l’aborda comme un pénitent courbé sous le poids de ses fautes. Elle le remarqua en riant :
— Qu’avez-vous, monsieur ? On dirait que vous cherchez un confessionnal et une absolution.
— Justement, mademoiselle, la vôtre.
— La mienne ? s’étonna-t-elle.
Il fit une allusion, — la plus délicate qu’il lui fût possible de trouver, — à la scène dont il avait été le témoin involontaire, et vit la jeune fille détourner la tête dans un mouvement de pudeur.
— Depuis ce jour, assura-t-il, je ne vois plus, dans l’hôtel et dans tout ce décor éblouissant, qu’une image. Ne l’avez-vous pas remarqué ?
Elle eut la coquetterie de demander laquelle.
— Celle de la moderne Antigone.
— Taisez-vous, supplia-t-elle. Ne parlez plus jamais de cela.
— Ne m’autorisez-vous pas, Mlle Nicole, à l’emporter un jour, avec moi, à Rome ? Il me semble qu’avec elle je
