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avait donné l’exemple et que cette organisation dont il tirait sa merveilleuse force, il ne tenait qu’à elle de la réaliser pour son compte et de s’en prévaloir, soit en face des revendications ouvrières, soit contre la faiblesse du Gouvernement.

Les premiers à s’organiser en vue d’une résistance efficace furent les propriétaires fonciers du Nord-Est. Quelques-uns d’entre eux s’étaient unis dès 1904 pour s’opposer ensemble aux exigences de leurs ouvriers agricoles (braccianti) : ils sortirent de cette première bataille vaincus et découragés. La grève prolongée qui sévit en 1908 dans toute la province de Parme les contraignit à un nouvel essai de résistance commune. Un homme énergique, le marquis Carega, prit la direction du mouvement. Une association (Agraria) groupa dans chaque province les propriétaires fonciers : chacun paya une cotisation proportionnée à l’étendue de son domaine, s’engagea à suivre les directions données par le Conseil de l’Association et remit aux mains du trésorier une lettre de change en blanc (cambiale in bianco), qui pouvait être tirée sur lui au cas où il violerait son engagement. Toutes les Agrarie furent reliées entre elles par une Fédération Inter provinciale, chargée d’assurer l’unité d’action économique et politique et d’entretenir les rapports avec le Gouvernement. L’institution d’une Société mutuelle d’Assurances contre les grèves (Mutua Scioperi), siégeant à Bologne, compléta cette organisation (1908).

Il y eut des actes d’indiscipline : ils furent sévèrement punis. Les ligues ouvrières refusèrent, au premier abord, de traiter avec les Agrarie, soutenant que le droit d’association était le monopole du prolétariat. A leur tour, les propriétaires refusèrent de passer individuellement des contrats de location ou de travail avec les ligues, et ils eurent le dernier mot. L’organisation des propriétaires fonciers s’étendit en peu d’années à la plus grande partie du royaume ; elle résista avec succès aux dures épreuves de 1910 ; elle groupa utilement autour des possesseurs de grands domaines un certain nombre de petits propriétaires et de fermiers. Après la guerre, elle établit à Rome son siège central ; trois directeurs président à son action : un directeur technique, un directeur politique, un directeur chargé des services de presse et de propagande. Il en a coûté 150 000 lire, qu’on n’a pas recueillies sans peine. Mais l’union est faite. Le S. A. N. (Segretariato Agricolo Nazionale) coordonne