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bénéficie de subventions à peine déguisées, telles que la tolérance d’acquitter ses impôts avec des retards de plus d’une année, en sorte que la baisse du mark les réduit de moitié et même dès trois quarts. Comme la main-d’œuvre anglaise est quatre fois plus chère que la main-d’œuvre allemande, nos alliés ne peuvent plus lutter et certains d’entre eux commencent à se rendre compte que si le chômage devient en Angleterre un véritable fléau, c’est avant tout parce que l’Allemagne sabote ses finances et consacre ses énormes ressources à son industrie et à sa marine marchande, tout en se déclarant incapable de remplir ses engagements et de payer les réparations. Mais Outre-Manche les yeux ne s’ouvrent que bien lentement, et les Allemands très avisés prennent en ce moment des positions dont il sera ensuite bien difficile de les débusquer.

L’importation française garde une certaine place sur le marché par les produits de luxe, qui restent inimitables, articles de Paris, modes, parfums, vins et liqueurs, et aussi certains appareils de précision ou machines qui nécessitent une main d’œuvre particulièrement soigneuse. La contrefaçon n’est pas le seul ennemi de ces industries de luxe : elles ont aussi à lutter contre les tarifs douaniers qu’un protectionnisme jaloux cherche à élever un peu partout contre toutes les importations étrangères ; il appartient à notre diplomatie de démontrer qu’il s’agit de produits dont la fabrication est à peu près impossible dans le pays et qui ne concurrencent pas ceux de l’industrie locale ; ce serait évidemment une erreur de l’aiguiller vers l’imitation de produits réellement originaux, alors qu’elle peut trouver un développement considérable dans les fabrications d’utilité première.

La grande guerre vient de prouver que nos canons de tous calibres sont les premiers du monde, et c’est l’artillerie française qui a armé toutes les divisions américaines qui ont combattu en Europe. Nos industries de guerre bénéficient de commandes assez importantes, mais ce mouvement aurait commencé depuis longtemps si nous avions su mettre en lumière que la France a adopté la première un fusil d’infanterie de calibre réduit (modèle 1886) à trajectoire tendue et a mis en service le premier canon à tir rapide, grâce à l’invention du frein hydropneumatique. Mais ces faits de toute évidence étaient insuffisamment connus ; dans une des capitales où j’ai séjourné,