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des officiers généraux m’ont révélé que si leur armée était encore affligée du canon Krupp, il avait été adopté après des expériences absolument concluantes en faveur d’un modèle français analogue au 75, et grâce à des moyens qu’ils qualifiaient de déshonnêtes. Des économies mal placées et une erreur de conception avaient mis notre artillerie lourde en retard, mais elle a vivement regagné le terrain perdu et distancé ses rivales. Notre char léger, agile et bien protégé, paraît en ce moment le meilleur modèle qui convient pour ces régions. Nos industries de guerre se présentent donc dans les meilleures conditions à ces nations qui sentent la nécessité de s’armer ; certes nous devons souhaiter que cette précaution reste inutile ; mais il n’y a que des inconvénients à nous laisser distancer sur ce terrain. Il faut donc encourager et soutenir les grandes maisons françaises sur le marché, en les engageant à s’entendre pour éviter de se concurrencer : ce fait regrettable s’est déjà produit, et il a eu des conséquences fâcheuses. Le Gouvernement possède assez de moyens d’action pour en éviter le retour.

D’une façon générale, on reproche aux maisons françaises de se montrer beaucoup trop exigeantes en matière de crédit. Faute de renseignements et d’une solide organisation bancaire, elles refusent beaucoup de commandes qui vont à l’étranger où s’ouvrent de larges facilités de paiement. L’importation à de pareilles distances exige chez nos industriels et nos commerçants l’abandon d’anciennes habitudes, dont l’extrême prudence ne s’accommode pas des nécessités modernes. Il ne peut être question d’ouvrir à tous les clients des crédits illimités, mais actuellement les maisons françaises sont les seules qui exigent la moitié du paiement en même temps que la commande et le reste à la mise en route de la marchandise : des agences de renseignements permettraient d’agir en connaissance de cause. S’ils savent se moderniser, notre commerce et notre industrie possèdent donc tous les éléments d’une expansion vraiment très appréciable, car on estime hautement leurs qualités traditionnelles d’honnêteté dans les transactions et de conscience dans les fabrications. Des succursales de banques françaises établies à l’étranger faciliteraient l’obtention des commandes et donneraient aux commerçants français des sûretés pour les paiements. Les Allemands avaient parfaitement compris ces nécessités et avaient créé des succursales à l’étranger.