Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1878.djvu/383

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quitté l’école, et, avant neuf ans, leur intelligence, incomplétement formée, ne peut répondre à ce qu’on attend d’elle. L’âge scolaire ne s’étend donc, en réalité, pour la très-grande majorité des enfants que de neuf à douze ans, soit trois ans, pendant lesquels l’enfant a, par semaine, une ou deux leçons d’une heure. Le résultat est, on le comprend, nul ou à peu près. Voilà pour les écoles de garçons.

Les écoles de filles, elles aussi, ont des salles de dessin ; les maîtresses qui les dirigent s’efforcent d’inspirer à leurs élèves le désir d’apprendre et sont très-fières de pouvoir, aux expositions annuelles, montrer une longue série de nez et d’oreilles exécutés dans leur classe ; elles sont bien plus fières encore quand leurs plus anciennes élèves en arrivent à pouvoir décorer un plat ou un éventail. C’est, certes, là le plus mauvais service qu’on puisse rendre à une jeune fille de la classe ouvrière ; c’est la tromper sur sa voie et lui réserver pour l’avenir les plus cruelles et les plus amères déceptions. La pauvre enfant s’imaginera bien vite qu’elle est une artiste, se trouvera déclassée, méconnue, et quand le moment sera venu pour elle d’épouser un brave ouvrier dont elle devra partager la rude existence, le courage lui manquera, et elle cherchera ailleurs les satisfactions qu’elle se croit en droit d’exiger.

Dans certaines écoles de filles du Nord, dites Écoles réelles ou pratiques, l’enseignement de la peinture sur porcelaine, de la décoration, des éventails, a été supprimé ; on apprend aux filles à coudre, à tailler une robe, à raccommoder leurs vêtements ; dans d’autres on leur apprend même à faire la cuisine, non pour en faire des cuisinières, mais pour qu’elles sachent, plus tard, préparer les aliments du mari d’une façon économique et agréable.

La couture, le raccommodage des vêtements, la science du ménage, voilà ce qui, pour les filles de la classe ouvrière, est préférable à l’enseignement du dessin. Quelles ressources pour elles, pour leurs familles, dans le présent et dans l’avenir !

M. Merruau, dans ses Mémoires sur l’administration de la ville de Paris, raconte que vers 1852 on entreprit de doter toutes les écoles municipales d’une classe de chant, de même qu’aujourd’hui on les dote d’une classe de dessin. On voulait ainsi